Senses of cinema (« Les sens du cinéma ») est une revue australienne en ligne, crée en 1999 par le réalisateur Bill Mousoulis. Les publications portent sur des critiques de films, avec des analyses filmique, ou de carrières, des cinéastes, et ce pour tous les films à travers le monde. Le journal participe aussi à la couverture d’événements comme les festivals internationaux.

senseofcinema

 Senses of cinema est un journal utilisant internet pour support et n’étant pas présent dans la presse écrite. Le mode de présentation du site ne laisse d’ailleurs pas supposer qu’il s’agit d’un journal. Il n’y a pas du numéro de revue publié chaque mois (il y aurait 60 numéros), l’accent semble être d’avantage mis sur les dossiers, de film ou de réalisateur. Les actualités récentes (« current issue ») portent aussi bien sur les derniers articles en date que sur le reste des publications ultérieurs au sein du site.

 La rubrique «About us » nous en apprend cependant bien d’avantage sur ce journal, que ce soit son histoires, les membres de son équipe, le rédacteur en chef Rolando Caputo, les publicitaires et sponsors etc… Ce qu’on pourrait nommer la « ligne éditoriale » de ce journal est précisément décrite dans cette rubrique. On comprend donc que les articles traitent surtout d’analyse filmiques, impliquant autant que possible des sujets théoriques et philosophiques. Le but est aussi de proposer une très large approche des films, de l’univers de la culture visuelle dans sa globalité. Les œuvres étudiées comportent toutes les nationalités avec une intention particulière pour les films australiens (le journal étant basé à Melbourne).

 Le site est particulièrement sobre, dans les tons noirs et blancs, avec une organisation proche de celle d’un blog (le site va cependant changer d’ici peu), une large bande noire comprend les différentes rubriques : les sujets récents figurants aussi sur la page d’accueil, la rubrique « à propos » , une rubrique entière dédiée aux liens, liens qui sont classés par thèmes (il y a par exemple une dizaine de site sur le cinéma asiatique). Le reste des rubriques regroupent l’essentiel du contenu, des dossiers : que ce soit les « dossiers spéciaux », une data-base des « grands réalisateurs », les « World poll » (sorte de tour d’opinion sur les films de l’année), les archives, les contacts, et une partie donation (un appel au don assez présent sur le site). Le journal possède en effet un très petit budget et ne déclare pas son activité comme étant à but lucratif.

 Une fois encore, il est difficile d’évaluer le « sérieux » et la confiance que l’on peut placer dans un site peu connu (du moins en France) ou n’étant pas reconnu comme une institution officielle de référence dans le monde du cinéma. Néanmoins, il semble difficile de se tromper au regard de la quantité et de la qualité des articles de ce journal. De plus, le visiteurs disposent de larges et complètes informations sur les rédacteurs, tous ayant déjà participé à des publications ou faisant partie de près ou de loin du monde professionnelle du cinéma. L’article sur Jean Cocteau est écrit par Richard Misel, un réalisateur et conférencier en analyse filmique à l’Université de Bristol. Il est également l’auteur de Chromatic Cinema (ed. Wiley-Blackweel, 2010). Ces informations sont contenus en fin de page après une bibliographie, une webographie et des notes de fin de page.

cocteau

Dans cet article, l’auteur se demande comment qualifier la production cinématographique de Jean Cocteau : était-il vraiment un cinéaste ? Bien sur qu’il était cinéaste, au même titre que romancier, poète, peintre, journaliste, promoteur, essayiste, une célébrité à temps plein…(ligne 2). Le cinéaste, à la différence du réalisateur, est un terme qui implique le concept de « politique d’auteur ». Dans une démarche de sacralisation et de reconnaissance de ces auteurs on les nomme cinéaste. Un terme qui convient indéniablement à Cocteau, avec ses trois films phares Le Sang d’un poètela Belle et la bête et Orphée. Cependant, comme le dit l’auteur, Cocteau s’est toujours considéré lui même comme un amateur. Comme beaucoup d’écrivains de l’époque (Aragon, André Breton, Colette), il s’est lancé dans l’adaptation au cinéma avec les avant-garde. Cocteau n’était pas attiré par un art plutôt que les autres (l5). « Instead he utilised all the media available to him to create a complex personal mythology which mixed imagery and text, poetry and prose, fact and fiction, realism and fantasy, history and modernity. »  Cocteau à recours à plusieurs medium pour projeter sa biographie-mythologie.

Heurtebise, Orphée et la princesse (Orphée)

Heurtebise, Orphée et la princesse (Orphée)

La question de savoir ou placer Cocteau, dans quel « genre » ou plutôt dans quelle « case », est le sujet de beaucoup d’écrit, surtout concernant sa production littéraire. L’intérêt de cet article est que celui-ci se place du point de vue de Cocteau lui-même face à sa production. L’auteur structure son article en annonçant ses intentions dans un premier temps : à savoir écrire un compte-rendu linéaire et chronologique de la vie de Jean Cocteau et de son travail, avec un intérêt particulier pour ses films.

L’avantage de cet article est qu’il présente des sources fiables, peu utilisés, avec des éléments de la vie de Cocteau beaucoup moins connus ou peu souvent évoqué (comme le scandale du ballet Parade avec Satie et Picasso). L’auteur prend aussi la peine d’insister sur sa place et ses relations avec le milieu artistique et les autres écrivains. L’auteur s’appuie sur les écrits de Cocteau mais aussi sur des ouvrages de référence tel que Jean Cocteau and his Films of Orphic Identity de Arthur B.Evans (Philadelphia, The Art Alliance Press, 1977).

L’auteur, toujours dans une démarche chronologique, suivant la vie de Cocteau, traite de 3 éléments caractéristiques de son esthétique, et que l’on retrouvera tout au long de son œuvre : la mythologie, le drame (la mort, thème réccurent), et le fantastique. On s’était déjà posé la question, au sein de ce blog, de savoir si Cocteau pouvait véritablement être classé dans le genre fantastique, du moins pour une partie de son œuvre. Ici l’auteur a la bonne initiative de replacer ce terme dans son contexte, et son évolution du XIXe au XXe siècle. Le fantastique de Cocteau se rapproche de celui d’Edgar Allan Poe et de Lovecraft. L’auteur le place ainsi dans la tradition des poètes romantiques et des pionniers du cinéma comme George Méliès et ses fantasmagories.

 La suite de l’article porte ensuite sur les 3 œuvres principales de la carrière de Jean Cocteau (Le sang d’un poète, la Belle et la Bête, Orphée). Ces films sont ceux qui ont connus une grande postérité et témoigne chacun d’une période spécifique de création dans la vie de Cocteau. Le choix de ses œuvres et leurs analyses nous paraissent ici tout à fait pertinentes et approprié. Et ce d’autant que la rédaction à le mérite de suivre pour fil conducteur, la vie même de Cocteau.

 L’auteur apporte une réponse, du moins une proposition de réponse à la « question » Jean Cocteau : a filmaker ? Cocteau lui-même dit ne pas appartenir au milieu du cinéma bien qu’il y rencontre un certain succès, il est avant tout un homme des lettres (« Cocteau was above all a man of letter »). De plus, essentiel de son œuvre ne porte pas sur le temps et l’amour, la mort et le temps, mais bien sur Cocteau lui-même. C’est surtout le cas pour Le Testament d’Orphée, le dernier de ses films.

Le Testament d'Orphée

Le Testament d’Orphée

 L’article se termine sur la mort de Cocteau, éclipsé par celle de Edith Piaf, décédée un jour avant lui (10 Octobre 1963) ainsi que sur un commentaire sur la postérité et la réception de Cocteau, un sujet habituellement peu évoqué, alors que nous avons nous même observé à quel point ce cinéma n’a pas particulièrement bien vieillit. L’auteur précise en effet que sa réputation à quelque peu décliné, bien que – comme Edith Piaf – Cocteau demeure une véritable institution. Après un période de déclin il semblerait que notre générations s’intéresse de nouveau à son œuvre, en témoigne la rétrospective au centre Pompidou. L’auteur termine en ces mots : « Cocteau’s work continues to endure in a cycle of death and rebirth ». L’oeuvre de Jean Cocteau est à l’image de sa production, un cycle de vie entre mort et renaissance.

Le Testament d’Orphée

   The Criterion Collection est une société d’édition vidéo, de DVD et Blu-Ray commercialisée aux Etats-Unis. « Son but est de proposer des éditions de référence de grands films du répertoire mondial, avec un accent particulier sur les cinémas américain, français, japonais et italien. » (article Wikipedia) Le site quant à lui sert à mettre en valeur cette collection, une collection dédiée aux rassemblements des plus grand films de par le monde avec pour but de les publier dans un format de haute qualité, avec un contenu supplémentaire permettant de mieux comprendre et apprécier ces films.

 L’onglet « Film » présente un menu permettant d’accéder à ces éditions, que ce soit par la barre le menu de gauche ou par le corps centrale composée de petites fenêtres illustrés (les nouveautés, les films à venir, tous les films…). Ceci serait en quelque sorte la partie « commerciale » avec la boutique en ligne (Shop). Mais l’essentiel du site consiste plutôt à présenter un contenu inédit et détaillé sur ces films. Outre la page d’accueil, proposant une navigation par un système de fenêtre, le visiteur peut se rendre sur la page « Explore ». Cette page propose une navigation part un top 10 des films, par des noms (réalisateur, acteurs etc) ainsi que des thèmes. La partie « Top 10 » est en fait un classement personnel, du point de vue d’un réalisateur, d’un acteur ou artiste, sélectionnant ses films préférés au sein de la Criterion collection. Exploration par thèmes est également très intéressante et très intuitive. Il ne s’agit pas d’une simple liste de genre mais d’une mosaïque d’image illustrant des catégories précise comme « avant-garde », « Classic Hollywood », mais aussi « amour fou », « food on film », « Blue  Christmases ». Un classement atypique mais néanmoins parlant pour des cinéphiles.

Le public cinéphile a justement la possibilité d’être actif sur ce site en créant un compte My Criterion, gratuitement, dont l’intérêt est de construire une bibliothèque virtuelle de film, de partager (également via Facebook, Twitter) et de rendre publique sa « Criterion page ».

La page qui nous intéresse concerne Jean Cocteau. Nous pouvons y accéder au moyen de l’onglet « Current » (regroupant des flux de nouveauté et des catégories) mais surtout par la recherche par personne (Explore>People>Jean Cocteau).

Testament-dOrphée

La page de présentation ne consiste pas en une biographie mais un court résumé de son œuvre, de son esthétique, d’une manière très brève mais néanmoins efficace. Ce genre de présentation s’avère utile pour le visiteur qui cherche surtout à savoir qui était Jean Cocteau en tant que réalisateur et si son œuvre peut lui plaire.

Criterion ne possède pas tous les films de Cocteau mais en distribue tout de même 6, choses étonnante lorsqu’on constate que les firmes françaises (même René Château vidéo) ne les commercialise quasiment plus.

Nous allons nous intéresser plus particulièrement à la page sur le Testament d’Orphée (Testament of Orpheus) dont nous n’avons pas encore parlé, et qui constitue le 3ème et dernier film de la Triologie Orphée. Ce film réalisé en 1959 et sorti en 1960 est en quelque sorte une suite d’Orphée, on y retrouve les mêmes acteurs: Jean Marais (Œdipe), Maria Casarès (la princesse), François Périer (Heurtebise), Edouard Dermit (Cégeste) ainsi que la figure du poète, incarné par Jean Cocteau lui-même. L’absence de narration logiquement construire fait qu’il est possible de visionner ce film indépendamment des autres.

Le poète et Oedipe (Jean Marais)

Le poète et Oedipe (Jean Marais)

Il n’est pas précisé ici que le titre d’origine du film est Le Testament d’Orphée ou ne me demandez pas pourquoi. « Ne me demandez pas pourquoi » est une phrase particulièrement récurrente dans le film, souvent prononcée par le poète pour illustrer l’absence d’explication aux événements, dans le sens d’un « pourquoi? » « Pourquoi pas ».

Revenons à la page dédié au Testament d’Orphée: nous notons une fois encore la présence, particulièrement plaisante, d’illustration au sein d’un visuel épuré, lisible. La barre d’info sur le film présente une présentation de l’intrigue (évidemment pas un résumé complet de l’histoire). Ainsi que le casting (d’acteurs), les crédits et les informations sur le DVD en lui-même.

Minerve et les hommes chevaux ( le Testament d'Orphée )

Minerve et les hommes chevaux ( le Testament d’Orphée )

La 3ème partie concerne les postes récents sur ce film, nous avons ici une seule rédaction (« film essays »), de Jean Cocteau lui-même. Il s’agit de la préface de Two Screenplays: The Blood of a Poet and The Testament of Orpheus (1985) éditée par les éditons Marion Boyars. D’autres films regroupent plus de rédaction, comme Orphée avec un article de Mark Polizzotti, éditeur pour The Metropolitan Museum of Art et souvent cité pour ses travaux sur le surréalisme.

Enfin, la 4ème partie « My Criterion » implique les usagers du site, leur notes, leurs collections, leur « lists » (une playlist de film) regroupant par exemple les « Spiritual Poets », « Godard Favorites 1956-1965 » etc.

La mort du poète

La mort du poète

The Criterion Collection est donc un site plutôt complet, aux références et contenu plutôt sérieux, et pas seulement axé sur des enjeux commerciaux mais aussi sur l’implication des usagers ayant la possibilité de se constituer une bibliothèque de films, des films difficile à trouver car peu commercialisés. C’est malheureusement le cas pour certains films de Jean Cocteau, comme le Testament d’Orphée. Ce film clos la Trilogie d’Orphée par la mort du poète et constitue sans doute la réalisation la plus autobiographique de Jean-Cocteau ou il y projette sa propre mythologie.

Jean Cocteau à Menton

Les ressources numériques sérieuses uniquement dédiées à notre sujet, Jean Cocteau et le cinéma, étant assez rares, élargissons nos sources et intéressons-nous au site officiel du Musée Jean Cocteau – collection Séverin Wunderman de la ville de Menton, commune française du département des Alpes-Maritimes, dans laquelle Jean Cocteau séjourna et laissa la trace de son génie artistique multiforme.

Musée jean Cocteau - Collection Séverin W

Le site du Musée, hébergé par  AMEN SASU, a été entièrement conçu par ce même Musée ouvert en 2011. Dans ses mentions légales, le Musée déclare que « les contenus du présent site représentent un volume important d’informations. Celles-ci sont régulièrement vérifiées  » assurant la qualité d’un contenu riche et exact.

Le site présente bien sûr dans l’une de ses rubriques ses « informations pratiques » (horaires, tarifs, contacts, plan d’accès)  que complète la rubrique « votre visite ». D’autre part, le site présente ses « évènements » comme l’exposition  Lucien Clergue, Écritures de lumière du 3 février au 9 septembre 2013 ou encore le nouvel accrochage de Cocteau, « Rouge et Or », inauguré le 2 décembre 2012 et consacré à son théâtre.

La rubrique « Le musée » nous propose de découvrir  sa structure mais aussi l’histoire de sa fondation, notamment grâce à Wunderman, passionné de Jean Cocteau, et qui sa vie durant collectionna des œuvres de l’artiste. Il fait don au futur Musée en 2003 d’une collection de 1800 pièces, dont 990 œuvres de Jean Cocteau, faisant du Musée la plus importante ressource publique mondiale de l’œuvre de Jean Cocteau. Cette collection est enrichie grâce à Lucien Clergue, photographe français et ami de Cocteau, qui fait don en 2011, à l’occasion de l’ouverture du Musée, de 240 photographies liées à l’œuvre de Jean Cocteau. Parmi elles on trouve de nombreuses photographies de tournage du Testament d’Orphée, dont une galerie, disponible en bas de la page dédiée  au photographe, permet un bref aperçu.

Face à cette riche collection, le « parcours muséographique » propose chaque année un accrochage renouvelé de 250 œuvres parmi lesquelles des dessins, des photographies, des peintures et des extraits de films rendant compte des talents multiples de Cocteau.

Jean Cocteau ou le génie protéiforme

Ainsi le nouvel accrochage « Rouge et Or », dont une présentation est disponible dans la rubrique « évènements » ou via « le Parcours Muséographique » (proposant une étude plus approfondie, néanmoins synthétique), a été inauguré le 2 décembre 2012 et se consacre tout particulièrement au théâtre de Jean Cocteau à travers six thèmes : « Le Mal Rouge et Or », « Vers une poésie de théâtre », « Les nouveaux monstres sacrés », « La tragédie revisitée », « Mettre en scène l’invisible », et  « Le cinéma de théâtre ».

Cette dernière thématique se consacre à l’adaptation cinématographique de L’Aigle à deux têtes, des Parents terribles et d’Orphée, qui sont, bien plus qu’un  théâtre filmé, « une nouvelle forme hybride de son œuvre : sa mise en scène cinématographique devient une mise en scène du regard, s’affranchissant de la distance que procure le théâtre », selon les mots du rédacteur de l’article. Sont exposés des extraits de films, des affiches originales, des photographies de tournage, ainsi que des maquettes de costumes réalisées par Yves Saint-Laurent pour L’Aigle à deux têtes prêtées au musée par la Fondation Yves Saint-Laurent.

Raymond Voinquel L’Aigle à deux têtes de Jean Cocteau (1947) [From the Réunion des Musées Nationaux]

Edwige Feuillère dans L’Aigle à deux têtes

 Le Musée Jean Cocteau – collection Séverin Wunderman doit aussi sa fortune à son architecture que la page d’accueil met en valeur au détriment de l’œuvre. Le projet architectural de Rudy Ricciotti fut retenu en 2008 à l’issue du concours international lancé par Menton et reçut le Grand Prix National d’Architecture. La  galerie, présente sur la page de ce projet architectural, permet de considérer ce vaste Musée de 2700 m² ainsi que son architecture design.

Musée Jean Cocteau – Collection Séverin Wunderman

Enfin, une rubrique « Jean Cocteau » propose également une galerie, ainsi qu’une biographie de l’artiste et un article « Jean Cocteau à Menton » qui retrace sa vie et son activité à Menton des années 50 jusqu’à sa mort, ville dans laquelle il fut conduit à l’occasion de la création de la Biennale de la peinture et du Festival international de musique de chambre. Charmé par l’atmosphère de la ville, Cocteau s’y installa, et plus qu’un lieu de vie, Menton devint pour lui une source d’inspiration : il contribua entre autres à la restauration et à la décoration du Bastion qu’il choisit pour musée, encore ouvert aujourd’hui et en collaboration avec le Musée Jean Cocteau – collection Séverin Wunderman.

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Mosaïque réalisée par Jean Cocteau pour le Musée du Bastion.

Bien que le site n’aborde pas en profondeur notre sujet, la richesse de la collection Séverin Wunderman, les thématiques abordées dans les expositions ainsi que la qualité du site apportent un matériau de poids dans la compréhension générale de l’oeuvre de Jean Cocteau ; oeuvre qui fut d’une richesse hors du commun et dont témoigne l’abondante collection de ce Musée.

Jean Cocteau et le cinéma : le merveilleux d’une rencontre

Article Jean Cocteau et le cinéma, consultable sur le blog du département recherche de l’Université de NY Paris.

Il s’agit du blog du département recherche de l’Université de New York Paris. NYU Paris est une sorte d’annexe de l’Université de New York à Paris. Les formations sont adressées aux étudiants spécialisés en culture et civilisation souhaitant réaliser une partie de leur cursus en France. Cette université existe depuis 1969 et joue aussi le rôle de « centre culturel » franco-américain.

La création de ce blog de Recherche semble assez récente (beaucoup de page sont en cours de construction) et la rubrique « Qui sommes-nous? » nous apprend que la liste des participant à la rédaction est en cours d’élaboration. Ce blog est un travail de collaboration entre « une  centaine de professeurs, maîtres de conférences, chercheurs, artistes et étudiants français ». Les auteurs sont donc français, ce qui n’empêche pas la rédaction d’article en anglais. Il n’est pas si clairement s’il s’agit ici d’un travail individuel ou de celui d’une équipe, comprenant la rédaction commune des articles. Nous n’avons pas non plus d’information plus précise sur les auteurs même si certains articles sont signés (par des étudiants ? des chercheurs ?). Et ce d’autant plus que l’onglet « contact » renvoie à l’adresse de la directrice de la Recherche à NYU Paris, on ne sait pas si celle-ci est véritablement en charge de ce projet.

L’onglet « Séminaires » reprend la même présentation dite « générale » que l’on retrouve aussi en page d’accueil: « Privilégiant les réflexions novatrices sur les transferts culturels dans le cinéma, la littérature, l’art, les nouvelles technologies et les pratiques sociales ».

Le propos est complété quelques lignes plus loin par le discours suivant : « Les chercheurs, les professeurs,  les doctorants,  les étudiants, et les artistes de toutes disciplines sont appelés à travailler ensemble sur les grands enjeux sociétaux du XXIe siècle en privilégiant les approches transdisciplinaires conçues comme un dialogue entre disciplines sociales, scientifiques, artistiques franco-américaines ».

Il n’est pas évident de comprendre l’enjeu exact de ces publications. Cette deuxième partie de la présentation semble d’avantage concerner le travail d’ensemble, au sein de la formation universitaire, des étudiants et chercheurs. On ne sait donc pas si leurs recherches portent exclusivement sur le XXIe, les artistes franco-américains en particuliers…? Il est donc difficile de donner une définition exacte de cet objet d’étude.

Le terme de « séminaires » désigne ici un grand 1 parmi les catégories. Le grand 2 étant les événements exceptionnels, le 3 les publications, le 4 les colloques, le 5 les journées d’étude et le 6 les ressources. Pour une meilleure lisibilité ainsi qu’une meilleure compréhension il aurait été utile de mettre en avant les catégories et les articles y étant associés. Car toutes les publications sont finalement regroupées sous ce terme de séminaire – terme qui comprend plutôt la dimension d’un travail en groupe – et non pas celui d’article.

La partie « Séminaires » est la seule à posséder des sous-catégories. La navigation y est difficile en raison des thèmes particulièrement disparates. Certains renvoient à une série d’article, mais aussi à des articles présentant le programme – cette-fois ci- de séminaire.

 L’article faisant l’objet de notre étude est compris dans la sous-catégorie n°3 : Littérature et Cinéma. L’article s’intitule Jean Cocteau et le cinéma et date du 1 janvier 2007 et écrit par Lydie Quaglia. Nous n’avons malheureusement pas plus d’information sur cet auteur ni dans quel cadre l’article a été proposé. Ce que l’on pourrait appeler un sous-titre « Le merveilleux d’une rencontre » figure en haut de page et suffit à nous donner le sujet du propos : la belle rencontre entre Cocteau et la réalisation cinématographique. Un vaste sujet donc, qui aurait sans doute requis plus de précision quant à une éventuelle problématique et de sélection des informations.

Sur le tournage d’Orphée

L’article commence par la citation suivante extrait du Journal (1942-1945) de Jean Cocteau : « […] Le cinéma, quelle écriture pour un poète ! Le texte n’est pas l’écriture dont je parle. C’est l’image, la chasse à l’image et la manière dont ces images s’emboîtent et forment la chaîne d’amour. » Cocteau l’a bien dit et redit, que ce soit en parole ou en image : il est un poète. L’auteur de l’artiste convient « d’insister sur un aspect qui différencie Cocteau des autres écrivains. Car justement, Cocteau n’est pas vraiment un écrivain. » Il est poète, et fait de la « poésie littéraire, plastique et cinématographique ». L’auteur  en vient ainsi à parler sur cet article multiple qu’est Jean Cocteau et insiste aussi sur la pratique de différents arts, la capacité de décloisonner, entre autres, le cinéma et la poésie.

L’auteur s’intéresse ensuite au processus de création, cette « force inconnue » que l’on retrouve au sein de son œuvre, et dont lui-même parle dans de nombreux écrit. L’auteur s’appuie sur de justes citations comme nous l’indique les notes : certes numérotées mais peu fournies, renvoyant en plus de cela à des liens mort (bien qu’on les retrouve en bas de page).

La création cinématographique pour Cocteau serait une véritable « bouffé d’oxygène » dans le sens ou « contrairement à l’écriture, le cinématographe n’est pas un art individuel et solitaire mais collectif ». Cocteau disait en effet, en voix off, dans Le Testament d’Orphée, que l’atout du cinématographe était de permettre aux personnes de vivre ensemble le même rêve.

Cet article a pour défaut d’être quelque peu inattendu dans le sens ou le sujet n’est pas rattaché à un ensemble ou à une présentation plus précise. Le propos de l’article n’est de plus pas annoncé, nous notons l’absence de référence bibliographique,  ou d’un lien pour citer. Malgré cela, richesse du contenu ainsi que la plume de son auteur nous conduit à placer cet article parmi les plus intéressants. La justesse du propos et le choix de thèmes habituellement peu traités constituent effectivement un bon résumé de la rencontre de Jean Cocteau avec le cinéma. Parmi ces termes abordés, et outre ceux déjà évoqués figurent les suivant : le retour à l’enfance, le tournage de la Belle et la Bête, la « paternité » de Cocteau pour ses films, son travail de scénariste… L’auteur parle également de la façon dont il conçoit le cinéma comme une forme de littérature, avec toujours se mélange des différents arts, dans le but d’apporter une légitimation plus forte au cinéma. Il est également mentionné la distinction que Jean Cocteau faisait entre cinéma et cinématographe ainsi qu’une autre question, qui pourrait faire l’objet d’une étude : Cocteau est-il un artiste moderne ? Il est en effet à la limite d’une modernité apparue au cinéma dans les années 1960-1970.

Jean Cocteau à la caméra (tournage Le Testament d'Orphée)

Jean Cocteau à la caméra

Nous recommandons ainsi ce bref et non moins intéressant article, sur un site difficile à naviguer, mais aux sujets d’études originaux pouvant suscite l’intérêt d’un large public.

L’invisible chez Coteau

OpenEdition est le portait d’OpenEdition BooksRevue.orgHypothèses et Calenda, quatre plates-formes dédiées aux ressources numériques dans le domaine des humanités et des sciences sociales.

Entrelacs est une revue annuelle, hébergée par revue.org, éditée en ligne grâce au Centre pour l’édition électronique ouverte (CLEO, Open dédition, CNRS). Cette revue est proposée par l’École Supérieure d’Audiovisuel (ESAV) et l’équipe Esthétique du Laboratoire de Recherche en Audiovisuel (LARA) de l’Université de Toulouse II le Mirail. Le directeur de cette publication est Pierre Arbus, enseignant chercheur à l’ESAV.

 

 Entrelacs est le lieu de publication, de valorisation des travaux dans le domaine de la création-recherche dans tous les champs du cinéma et de l’audiovisuel. La revue est essentiellement destinée à des créateurs dans ce domaine, des enseignants-chercheurs, des docteurs et des doctorants comme c’est le cas pour Rana El Gharbie qui à rédigé l’article L’invisible…Dans le cinéma de Jean Cocteau faisant l’objet de notre étude.

Cet article est contenu dans le 8e numéro de Entrelacs qui adopte une présentation épurée, facilement abordable et lisible. C’est du moins le cas pour l’article qui présente bien distinctement un résumé, un plan, le texte, des notes, citation, et auteur(s). Pour ce qui est du site en lui-même la navigation est bien moins évidente avec 3 barres de navigation en haut de page en plus de la colonne de gauche, accolé à l’article. Les articles ne sont pas rangés en thème ou en catégories, on observe surtout une série de titres un peu floues, plutôt longs, sans savoir exactement à quoi se référer.

Le site possède deux barres de recherche, l’une concernant la totalité d’OpenEdition, l’autre dédiée aux recherches internes dans Entrelacs. Or on se rend compte que l’une comme l’autre renvoient à la même page, sur le portail d’OpenEdition.

La barre de navigation située tout en haut renvoie à OpenEdition ainsi que tous les cites qui y sont rattachés: OpenEdition Books, Revue.org, Calenda, Hypothèses, avec à côté une souscription pour s’abonner à la Lettre d’OpenEdtion et un autre onglet qui dirige vers le programme Freemium d’OpenEdition.

En dessous, la seconde barre de navigation concerne directement l’article consulté, avec les informations, références, la possibilité de télécharger l’article au format PDF ainsi que des icônes pour partager l’article (sur Twitter, Facebook…). La 3ème barre, qui serait sans doute bienvenue en deuxième position, concerne Entrelacs avec Accueil > Numéros > 8 > *nom de l’article* qui permet de situer celui-ci dans le site.

 En ce qui concerne la forme de l’article en elle-même, comme nous l’avons dit précédemment, celle-ci permet une grande visibilité: avec l’annonce du plan, chaque partie renvoyant au passage concerné. Seule l’introduction n’est pas véritablement indiquée, mais le résumé suffit à saisir le contenu général de l’article. Au niveau du texte intégral on retrouve une icône pour agrandir le texte, pour l’imprimer, l’envoyer par courrier électronique, ou encore le convertir en format PDF. Une grande attention semble accordée au partage et à l’appropriation du contenu. Les notes que comporte le texte sont à la fois signalées dans la marge et à la fois en bas du texte. Chaque numéro renvoyant directement, par défilement, à la note concernée.

 Le texte débute avec une citation de Jean Cocteau qui semble presque, à elle seule, justifier la raison d’être d’une telle étude: « Il n’est pas impossible que le cinéma puisse un jour filmer l’invisible, le rendre visible, le ramener à notre rythme, comme il ramène à notre rythme la gesticulation des fleurs. » Ce serait là le « défi » que Cocteau aurait lancer au cinéma, soit « filmer l’invisible« . Or la citation n’est pas ici clairement explicité: le cinéma révèle en réalité l’invisible, fait apparaître quelque chose au sein de cette œuvre. Le cinéma à la capacité de découper un mouvement, Cocteau prend ici l’exemple de la gesticulation des fleurs. Ainsi le cinéma permettrait cette décomposition du mouvement dans le temps, nous permettant d’observer ce que d’ordinaire on ne voit pas. Mais Cocteau ne donne pas sa propre définition de ce qu’est l’invisible, et c’est aussi le grand défaut de l’article que de ne pas le faire. L’invisible est le sujet même de ce texte et aucune définition n’est proposée. On ne comprend que dans la première partie (La théorie de l’invisible dans les écrits de Jean Cocteau) que l’auteur entend par « invisible » la partie intime de Jean Cocteau, en contraste avec son personnage physique bien trop public. Mais cela est-il vraiment le sens de la phrase de Cocteau? Parler de son ressenti intime à lui seul face aux critiques de personnes comme André Gide, André Breton?

Jean Cocteau par Man Ray

Jean Cocteau par Man Ray

L’auteur poursuit son explication ainsi : « Cocteau réussit donc à transformer cette invisibilité en une dynamique personnelle jusqu’à en faire un concept fondamental de son œuvre. » Nous dirions plutôt que c’est ici l’auteur qui fait de cette invisibilité la dynamique de son œuvre. « L’œuvre d’art est pour Jean Cocteau substantiellement invisible. Si l’invisibilité rime avec l’incompréhension, le poète en fait l’essence de sa création puisqu’il met « au doigt de [son] œuvre l’anneau qui donne l’invisibilité». Là en revanche nous touchons du doigt l’intérêt du sujet: l’œuvre d’art est substantiellement invisible. L’invisibilité n’induit cependant pas une incompréhension, si Cocteau met « au doigt de [son] œuvre l’anneau qui donne l’invisibilité » ce n’est pas dans le but de la cacher. L’auteur a cité la référence de cette phrase de Cocteau sans pour autant faire le lien avec l’anneau de Gygès de Platon, également appelé « l’anneau d’invisibilité ».

 Pour revenir à la question de l’invisible, l’auteur poursuit en ces terme « Cocteau choisit le cinématographe pour rendre visible son invisibilité. Il va à la rencontre de l’inconnu pour filmer l’invisible. » C’est le moment idéal pour d’avantage expliciter cette problématique, cependant le lecteur se trouve perdu en étant directement projeté dans un 2ème partie « La création et la mort ou l’imaginaire du poète » qui ne semble pas faire le lien.

Nous dirons qu’en réalité, ici, l’œuvre cinématographique de Cocteau est le lieu de l’apparaître. Qu’est-ce qui apparaît dans cette œuvre/dans le contact avec l’œuvre? L’un des terme est polysémique l’autre est polémique. L’œuvre d’art est un objet crée par un homme doué de talent/génie, ayant une signification et dépassant la pure utilité. Au sens classique l’œuvre d’art est le résultat d’une activité créatrice visant à exprimer un idéal esthétique. Quel rapport existe-t-il entre cette expression et l’apparaître ? Autrement dit l’expression est-elle une reprise, une copie de ce qui apparaît dans la nature ou bien est-elle ce qui fait apparaître ? L’œuvre cinématographique est un objet crée avec l’intention de signifier quelque chose, elle est le lieu d’un sens et elle est faite pour apparaître, c’est-à-dire pour être perçue. Cette oeuvre d’art est faite pour apparaître et est aussi faite par l’apparaître et fait elle-même apparaître quelque chose.

Apparaître signifie se montrer, paraître comme, donc sembler ou prendre une apparence (sens platonicien). Un autre sens : apparaître signifie se révéler, devenir visible, se dévoiler. Un Troisième sens : apparaître signifie venir à l’être, commencer d’exister. Le premier sens me demande : l’œuvre d’art me présente-t-elle une apparence superficielle, mensongère ou au contraire l’œuvre d’art nous révèle-t-elle un être qui reste caché hors d’elle ? Comme le dit l’article, Cocteau questionne justement ce rapport entre le réel et l’imaginaire.

L’autre solution est l’œuvre d’art amène-t-elle quelque chose à l’être ? Quel est le sens de l’œuvre d’art, est-elle représentation/expression/création chez Cocteau ? Des éléments de réponses apparaissent dans la conclusion de l’article sans pour autant être véritablement traités: « Cocteau filme l’invisible pour se rendre paradoxalement visible. Les images de ses films, notamment de son cycle orphique, baignent entièrement dans l’imaginaire du poète cinéaste. Ils rappellent sa difficulté d’être et analysent les secrets de son mécanisme créateur. Accusé d’être excessivement visible, le poète rectifie son image trop apparente, trop irréelle. Il demande au spectateur de rendre visible son invisibilité, de mettre en avant son être et de condamner son paraître ».

Ce qui nous amène à compléter et à dire que l’œuvre cinématographique de Cocteau est la manifestation de sa subjectivité. La dialectique apparaître/cinéma: le film amène l’être à la présence. Le film fait être ce qu’il supporte et s’efface derrière lui. Ainsi cet art qu’est le film peut créer la beauté, et surtout, chez Jean Cocteau, la poésie.

 Ainsi nous proposons sans doute ici qu’une autre vision de ce sujet que l’on ne jugera qu’à moitié traité dans cet article qui regroupe pourtant l’essentiel des éléments de l’esthétique et de la démarche de Jean Cocteau. Néanmoins, ce texte est utile pour avoir un aperçu global des grandes thématiques de son œuvre, avec quelques éléments d’analyse et un regard surtout centré sur Le sang d’un poète et Le Testament d’Orphée.


https://jeancocteaucinema.wordpress.com/tag/le-testament-dorphee/
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Le Sang d’un poète

Openculture a été créé par Dan Colman, principal éditeur, en collaboration avec Mike Springer, Colin Marshall, Josh Jones,  Eric Oberle,  Matthias Rascher, et Kate Rix, dont un détail biographique est donné dans About Us. Ouvert en 2006 Openculture ne cesse depuis lors de rassembler des liens renvoyant à des sites culturels variés, son ambition étant de rendre accessible la richesse numérique du web parfois difficile à trouver.

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Le site propose ainsi des livres audio, des livres en ligne, des cours des meilleures universités, des ressources pour apprendre des langues, des sites éducatifs pour les enfants, ainsi que de nombreux films. Par ailleurs, la mise à disposition de ces liens s’accompagne souvent d’articles rédigés par les membres de Openculture, articles recensés dans la rubrique « archive » et classés par date de parution ou par sujet.

La richesse de ce site lui a garanti une certaine renommée avec plus de 2,8 million de visiteurs par mois, et Openculture encourage ses internautes à partager le site via les réseaux sociaux, à émettre leurs avis ou suggestions en s’adressant aux membres du groupe, et surtout à proposer des liens afin d’enrichir cette vaste entreprise de recensement numérique.

Le site met ainsi à disposition le film Le Sang d’un poète, disponible sur Youtube, et la page est accompagnée d’un article de Mark Springer publié le 8 novembre 2012.

La page de l’article propose également le site officiel dédié à Jean Cocteau ainsi que trois liens plus ou moins relatif à l’entourage cinématographique de Jean Cocteau : une page regroupe quatre films de Man Ray, une autre est consacrée à Anémic Cinéma de Marcel Duchamp, et enfin une dernière qui concerne le Ballet Mécanique de Fernand Leger. Ces films sont également accompagnés d’articles.

L’auteur sans rentrer dans une analyse présente de manière succincte Le Sang d’un poète (1930) en se faisant l’écho de Jean Cocteau. Mark Springer reprend en effet des extraits de son essai La Difficulté d’être (1946), œuvre qu’il ne mentionne cependant pas, mais que nous vous invitons à lire sur le site de l’Université de Metz qui en propose un passage.

L’auteur devient ainsi le porte-parole de Cocteau et met à bas toute mauvaise interprétation ou cliché concernant son premier film souvent qualifié de surréaliste alors même que Cocteau ne se reconnaissait pas dans ce mouvement, lui qui cherchait dans les confins de l’âme humaine ses inspirations poétiques à travers un film hautement expérimental : « Le Sang d’un poète n’est qu’une descente en soi-même, une manière d’employer le mécanisme du rêve sans dormir, une bougie maladroite, souvent éteinte par quelque souffle, promenée dans la nuit du corps humain. Les actes s’y enchaînent comme ils le veulent, sous un contrôle si faible qu’on ne saurait l’attribuer à l’esprit. Plutôt à une manière de somnolence aidant à l’éclosion de souvenirs libres de se combiner, de se nouer, de se déformer jusqu’à prendre corps à notre insu et à nous devenir une énigme. » Jean Cocteau, La Difficulté d’être, 1946. 

La traversée du miroir ou la descente en soi-même, Le Sang d’un poète, 1930

Les affres de la création ou comment représenter l’acte créateur à l’écran

Intéressons-nous désormais au premier film de Jean Cocteau, Le Sang d’un poète, à travers un article disponible sur http://www.cndp.fr/mag-film/les-films/le-sang-dun-poete/plans-rapproches.html, article qui concerne la première partie du film intitulée « La main blessée ou les cicatrices du poète ».

Cet article est proposé par le SCÉRÉN – CNDP. Le SCÉRÉN (Services, culture, éditions, ressources pour l’Éducation nationale) est un réseau national qui regroupe depuis 2002 sous cette appellation l’ensemble du réseau formé par le CNDP (centre nationale de documentation pédagogique), qui coordonne les 31 Centres régionaux de documentation pédagogique (CRDP), et de leurs Centres départementaux (CDDP) et locaux. Il s’agit donc d’une vaste organisation nationale culturelle qui affirme dans sa présentation « son identité de service public en éditant les produits correspondant aux grandes orientations de la politique éducative, en mettant à la disposition des professionnels des ressources pédagogiques de toute nature, en accompagnant les arts et la culture à l’école. » Le SCÉRÉN est sous la tutelle du ministère de l’Éducation nationale et, en tant qu’éditeur de l’éducation nationale française, le SCÉRÉN et ses établissements ont une mission pédagogique d’édition, de partage, de diffusion et de mise à disposition de divers ressources culturelles, parmi lesquelles les ressources numériques.

En effet, le SCÉRÉN travaille également dans le cadre des TICE (Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement), c’est-à-dire « de la politique de relance et de généralisation des technologies de l’information et de la communication à l’école ». Ainsi dans les nombreuses rubriques que le CNDP propose, l’une d’elles est intitulée Mag Film. Il s’agit d’une rubrique consacrée aux analyses de films en tout genre effectuées par les participants du site. Deux des films étudiés par les membres du CNDP sont de Cocteau : La Belle et la Bête et Le Sang d’un poète sur lequel nous allons nous pencher. Aussi cet article datant de 2004 et rédigé par Philippe Leclerq, professeur de lettres modernes, nous livre-t-il une réflexion sur les premières scènes du film de Cocteau : « comment signifier l’acte créateur à l’écran ? »

Le sang d’un poète est le premier long métrage de Jean Cocteau, souvent qualifié de « film expérimental », réalisé en 1930. Découpé en quatre épisodes, l’auteur de l’article se consacre à l’analyse du premier chapitre, « La main blessée ou les cicatrices du poète ». Le texte est accompagné d’images tirées du film qui appuient le propos de l’auteur qui suit, dans son analyse, l’ordre chronologique du film par un découpage en séquence suivant les plans du film. Mais plus qu’une simple description de plan, le rédacteur propose une interprétation, nous permettant ainsi d’aborder l’œuvre de Cocteau. Il pose, avant toute réflexion, la question de savoir « comment signifier l’acte créateur à l’écran ? », et par extension comment rendre visible l’invisible, problématique au cœur de ce premier épisode, consacré aux « affres de la création », titre de l’article, à travers le personnage d’un poète : comme le dit Philippe Leclercq, il s’agit « d’une mise en abyme de Cocteau lui-même ».

En effet, Cocteau parle du Sang d’un poète comme « d‘une descente en soi-même, une manière d’employer le mécanisme du rêve sans dormir, une bougie maladroite souvent éteinte par quelque souffle, promenée dans la grande nuit du corps humain. ». C’est l’artiste en quête de lui-même et de sa création, création qui semble intimement liée à la souffrance. Cette douleur est matérialisée par une cicatrice sur le dos du poète accompagnée de l’étoile de Cocteau, en guise de signature, ce qui indique clairement que le cinéaste se voit dans son personnage. La création n’est donc pas sans souffrance, et c’est finalement elle qui la permet : le poète-dessinateur-sculpteur finit par embrasser avec passion la paume de sa main sur laquelle est apparue une bouche féminine et sensuelle – bouche du visage qu’il a dessinée au début, puis passe sa main sur son torse de manière langoureuse, le regard inquiet. La bouche, sa création, lui colle à la peau : l’artiste doit accepter de faire corps avec son œuvre.

Ainsi le créateur se mêle avec sa création, malgré ses doutes, la terreur et le vertige qu’elle provoque. Ce geste narcissique, également révélateur d’un amour morbide pour la souffrance, est explicite à l’entrée dans le deuxième épisode, soit dans le deuxième monde. Le poète s’immerge en effet littéralement dans un miroir – miroir que l’on retrouvera dans toute son oeuvre, étant l’allégorie de l’Invisible, de l’Imagination, du Rêve, mais aussi de la Mort, et matérialisant cette « descente en soi-même« . C’est ainsi que le poète traverse son reflet en suivant l’invitation d’une statue sans bras, drapée à l’antique, la poitrine découverte, qui rappelle évidemment la Vénus de Milo, à laquelle il a donné vie tel Pygmalion, en l’embrassant de sa main. Ce baiser symbolique révèle une fois de plus l’acte créateur : l’artiste donne vie à son imagination et à son art.

Et quel meilleur moyen pour Cocteau que de parler de la création dans la création elle-même ? S’en suit un film aux images fantasmagoriques, voire surréalistes – bien que Cocteau ait manipulé ce terme avec précaution – en explorant avec liberté, invention et poésie, les possibilités qu’offre l’art du cinéma. Car le cinéma permet justement de rendre visible l’invisibilité de la création, l’invisibilité de l’univers intime du poète, de ses rêves, et des mondes et fantasmes qui le hantent.  D’autant que s’agissant du premier long métrage de Cocteau, celui-ci interroge le langage cinématographique et use de nombreux trucages à la Méliès qui sont autant de façon de nous embarquer dans différents univers oniriques. Aussi, dans le deuxième épisode, le poète en s’adonnant à un certain voyeurisme, regarde-t-il tour à tour par le trou de la serrure des chambres les scènes surréalistes qui se passent à l’intérieur et qui fonctionnent comme des saynètes dignes des premiers temps du cinéma. Il s’agit donc d’une quête artistique à plusieurs niveaux : celle de Cocteau en tant que cinéaste et celle du poète voyageant dans son rêve, qui n’est finalement autre que Cocteau lui-même. Cette mise en abyme est d’ailleurs annoncée dès le premier plan du film dans lequel se trouvent des projecteurs et autres machines cinématographiques, et par la présence de la voix off de Cocteau.

Ainsi, l’acte de la création artistique, qui va de paire avec la douleur physique et mentale, est le sujet central du premier épisode. Cocteau questionne sur ce qu’est la création, liée au rêve, et sur la façon dont l’image cinématographique peut en rendre compte pour sortir de l’invisible. Ce premier film est déjà révélateur de l’œuvre cinématographique à venir, entre allégorie et poésie. Même s’il aurait été intéressant de lire une analyse sur l’intégralité du film, l’article de Leclercq nous donne déjà les pistes de réflexion nécessaires pour aborder le film ainsi que l’univers de Cocteau.

Avant le baiser de la Vie …


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Jean Cocteau : Opéra « perdu »

Nous avons suffisamment insisté sur ce point, ce blog n’a pas seulement pour ambition de présenter et de critiquer des articles extraits d’internet, mais aussi, de montrer en quoi Cocteau était un artiste polyvalent. Jusque là, nous vous avons assez peu parlé de la musique dans l’oeuvre et dans le cinema de Cocteau. Mais rappelons tout de même (voir biographie) que celle-ci eu une importance capitale dans sa carrière puisqu’il écrivit un certain nombre de livret d’Opéras et de ballets.

Ainsi donc, le site internet des Inrockuptible, www.lesinrocks.com, regroupe un ensemble d’articles (que vous trouverez sur le lien suivant : http://www.lesinrocks.com/artiste/jean-cocteau/) à propos de ses opéras et de ses films. Certains articles sont extrêmements virulents, d’autres adoptent un point de vue moins critique, notamment lorsqu’il s’agit de l’article intitulé « L’épouse injustement soupçonné » à propos du livret retrouvé d’un de ses Opéras.

Avant toute chose, il est important que vous soyez informé sur l’usage et le contenu du site des Inrocks. Celui-ci se présente plus ou moins comme la version papier de leur journal.

On trouve (ce qui est classique mais n’en ai pas moins pratique) une bande en haut de la page, proposant une ballade dans les diverses catégories du site (actu, mode, arts et scène, etc). On comprend donc vite qu’il s’agit d’un site à la fois d’information générale et d’actualités artistiques.

Pour chacun des encarts artistiques, vous trouverez une rubrique « news » qui vous renvoi aux actualités du domaine.

Chaque article ou chronique du site, est surplombé de petites icônes vous permettant le partage de la page sur les différents réseaux sociaux (facebook, twitter etc.).

Personnellement j’ai une grande critique à faire à ce site, c’est l’abondance d’images, d’encarts, de publicités et de liens qui sont partout omniprésents sur la page . Outre la laideur et la multiplicité des couleurs choisi pour les polices d’écritures, je trouve que cette oppression d’image empêche la bonne lecture des articles et chroniques. Par exemple, sur la page qui répertorie les articles concernants Cocteau, une fois que notre curseur à dépassé la liste des articles, le chemin jusqu’au bas de page est exclusivement constitué de publicité.

Pour ce qui est du contenu des articles, leur longueur est relativement inégale. Certain ne se compose que d’un seul et unique paragraphe, je pense notamment à celui ci : http://www.lesinrocks.com/cinema/films-a-l-affiche/orphee/, qui en plus d’une verve significative manque crument d’arguments. L’auteur affirme que l’Orphée de Coteau met en scène un Jean Marais narcissique et n’est, en quelque sorte, que le miroir de son auteur, cependant on peut lui reprocher de ne pas aller plus loin dans la réflexion.

L’article qui m’a le plus intéressé sur cette page fut celui sur l’Opéra «retrouvé» car nous avons encore assez peu parlé de musique ici.

http://www.lesinrocks.com/artiste/jean-cocteau/

Jean Cocteau, n’était pas seulement un poète du cinema, il en était aussi un de la musique. Comme on a pu le voir dans sa biographie, il écrit assez rapidement, dans sa vie, ballet et Opéra. L’article des inrocks nous rapporte qu’un livret inédit de Jean Cocteau, se voit enfin représenté plus de 70ans après. Cet opéra intitulé Interprétation moderne, s’inspire librement d’un légendaire drame annamite. Finalement pas si loin de son cinema, on y retrouvera la même ambition féerique et « surréalisante ».

Orphée: le pouvoir de la poésie (1)

    Le site « Kusanaki » se présente lui-même comme étant « entre le dvd et le Blu-ray, entre la 3D et le goût du 16 mm ; le cinéma de nos Auteurs et de leur politique ». En somme, ce site, présente le travail d’une dizaine d’auteurs autour de « dossiers cinéma », des études et analyses d’extrait de film, ou sur le travail d’un réalisateur, soit dans son intégralité, soit sur de ses films en particulier. Kusnaki propose des actualités récentes sur des films à l’affiche, mais s’intéresse aussi à un cinéma moins récent comme celui de Jean Cocteau.

Il s’agit d’un « dossier », contenant une somme d’information se voulant plutôt complète, avec des éléments d’analyse filmique sur l’œuvre de Jean Cocteau. Outre la partie intitulée « Orphée » à laquelle nous nous intéressons, ce dossier comporte une biographie de Jean Cocteau ainsi qu’une petite présentation et présentation de chaque film, accompagnée d’illustrations ou d’extraits vidéo.

Ici, l’article sur Orphée débute, dans la mise en page, par une image extraite du film : Marias Casares, qui joue le rôle de la Mort/du Destin, a un geste tendre envers le poète Orphée, incarné par Jean Marais. Le poète aime la mort et se fait aimer d’elle. Il s’agit là d’un point important du film Orphée, porté par ces deux personnages principaux emblématiques.

L’auteur de cet article présente le film comme faisant partie de ce que nous nommerons la « trilogie Orphée », comprenant Le Sang d’un poète (1930)Orphée (1950), et Le Testament d’Orphée (1960). Ces trois films comportent une dimension très personnelle où Jean Cocteau s’identifie au personnage du poète. Ces films composeraient, selon l’article, « une sorte d’autobiographie cinématographique », ce sur quoi nous pouvons émettre quelques réserves. Il est en effet très difficile de placer le cinéma, et même la production artistique entière de Jean Cocteau dans de quelconque catégorie. Le « cinéma de poésie » est, il faut l’admettre, un genre plutôt rare. Cocteau lui-même avait du mal à classer ses œuvres et voulait avant tout s’affranchir des catégories pour faire triompher sa subjectivité. On comprendra donc cette trilogie comme étant une sorte d’auto-fiction, ou une biographique au sens de films « autoréférentiels ».Orphée le poète

L’article présente Orphée comme un film plutôt accessible au grand public, tout comme la Belle et la Bête, et place Cocteau au « faîte de sa gloire ». Il est vrai que Orphée présente une intrigue de type policière, précise, dans un genre moins surréaliste que Le Sang d’un poète. Le film a également été nommé dans la catégorie du meilleur film, lors des BAFTA Awards de 1951. Cela se justifie en partie par le fait que Cocteau reprend le célèbre mythe d’Orphée, Orphée personnage éponyme qui incarne l’archétype du poète de la mythologie grecque. Le mythe d’Orphée ne se prête d’ailleurs pas à de grandes modifications, mais reste indémodable, « c’est le privilège des légendes d’êtres sans âge », comme le dit la voix de Cocteau au début du film.

Jean Cocteau renouvelle ce mythe, sans changer sa structure interne, tout en lui imposant de nombreuses modifications. Il y a en effet, toujours selon l’article, une « recontextualisation du mythe dans la fin des années 1940/début des années 1950 » l’irréel se retrouve donc « au beau milieu d’un monde réaliste et contemporain, ce qui le renforce ». Le film permet, selon Cocteau, de donner l’apparence de la réalité à l’irréel. Orphée est en effet très riche en effets spéciaux, « des décors renversés ou des inversions de pellicule » (comme pour la scène des gants, la levé du corps de Cégeste), des « miroirs liquides » qui sont en fait des plans de mercure etc…

« Un autre élément du récit que Jean Cocteau a modifié dans son œuvre est le rapportd’Orphée avec son épouse. Dans le mythe original, le poète, ne pouvant supporter la perte d’Eurydice, décide d’aller aux Enfers par amour et de la ramener parmi les vivants. Ici, si Orphée descend aux Enfers, ou plutôt passe à travers le miroir pour rejoindre « la zone », c’est autant pour revoir la princesse, symbole de la mort, dont il tombe amoureux que pour ramener sa femme ».

Orphée ne pouvant regarder Eurydice

Orphée ne pouvant regarder Eurydice

L’auteur de cet article n’est pas le premier à considérer que Orphée est plutôt épris de la Mort, soit la princesse, que d’Eurydice (Marie Déa). Une interprétation qui a tendance à oublier que la Mort est avant tout une personnification. Pourtant, l’article mentionne cette distinction à ne pas négliger, « cette princesse n’est pas exactement la mort » « la princesse n’est qu’une des figures de la mort parmi tant d’autres », elle incarne en effet la mort de chaque personne les unes après les autres et n’est qu’un exécutant. La Mort, ou « le Destin », choisit cependant d’outrepasser ses fonctions, comme le souligne une fois encore l’article, en tuant arbitrairement Cégeste et surtout Eurydice. Mais ceci ne suffit pas à en faire un être de chair et de sang que Orphée pourrait aimer de la même manière qu’il aime Eurydice.

Si Orphée néglige sa femme, c’est qu’il est absorbé par sa « condition de poète »sa descente aux Enfers symbolise cette expérience dangereuse qui donnera toute sa profondeur et sa seule réalité à son œuvre. De plus, Orphée est affecté par la mort d’Eurydice, si il ne le montre pas autant qu’il le devrait, c’est qu’il se croit encore dans son rêve, un rêve devenu cauchemar « c’est le rêve qui continu, le cauchemar, qu’on me réveille ! ». Il se rend compte à cet instant, qu’après avoir rêvé, écrit, chanté la mort dans sa poésie, il ne la connaissait pas vraiment. Heurtebise (François Périer), chauffeur et acolyte de la Mort lui demande alors ce qu’il souhaite, retrouver la Mort ou retrouver Eurydice. Sachant que l’une ne va pas sans l’autre, Orphée répond « les deux ». Heurtebise ajoute alors « et si possible trompez l’une avec l’autre ». Alors, Orphée a t-il trompé Eurydice ou a t-il trompé la Mort ?

Maria Casarès dans le rôle de la Mort

Maria Casarès dans le rôle de la Mort

Nous voilà face à une première interrogation que le site omet de soulever au travers d’un propos certes bien documenté (de nombreuses citations et extraits du Cinématographe), mais quelque peu simpliste et formel. Il manque également la mention de l’aspect poétique du film, du rôle central du poète ainsi que la projection du mythe sur « l’auto-mythographie » de Cocteau. Nous reviendrons dans un prochain article dans la catégorie « La trilogie Orphée » sur ces questions, à partir de d’autres ressources. 


https://jeancocteaucinema.wordpress.com/category/la-trilogie-orphee/orphee/