duminică, 4 octombrie 2020

8 1/2 -- Fellini / 1963

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8 1/2 de Federico Fellini : la ronde de la vie

huit et demi

8 1/2 (1963) de Federico Fellini est une confession publique énoncée dans le langage du rêve. Peu de films parviennent à consacrer l’alliance du cinéma et de la vie intime d’un réalisateur avec cette grâce. On sait qu’il s’agit du huitième film et demi de Fellini et que celui-ci eut l’idée, à première vue présomptueuse, de faire de sa propre crise d’inspiration la matière d’un film. Aussi se met-il en scène, ou plutôt une version sublimée de lui-même, à travers le personnage du cinéaste Guido Anselmi, incarné par Marcello Mastroianni, son alter ego depuis La Dolce Vita (1960). Hanté par ses rêves, poursuivi par les actrices, les auteurs, les journalistes, les producteurs, les intellectuels, mille et un quémandeurs enfin, qui gravitent autour du film qu’il prépare, Guido entre en cure thermale en espérant recouvrer l’inspiration qui l’a abandonné.

8 1/2 est un film si riche qu’on ne sait par quel bout le prendre. Il y a d’abord cette extraordinaire beauté formelle que le film déploie dans les décors somptueux de Piero Gherardi, un ancien architecte qui fut un artiste à part entière. Le noir et blanc du chef-opérateur Gianni di Venanzo est inouï, avec comme souvent chez Fellini un blanc lumineux et éclatant, un blanc virginal dont il attend peut-être une renaissance. Au son de La Chevauchée des Walkyries de Wagner (Fellini se moque gentiment des files d’attente de curistes), du Barbier de Séville de Rossini ou de Casse-Noisette de Tchaïkovski, la caméra évolue entre les groupes de patients de la cure avec une grâce de danseuse, constamment en mouvement, comme une invité participant aux festivités. C’est une caméra souvent subjective qui tourne régulièrement sur elle-même, selon un harmonieux mouvement de ronde, faisant du monde une prison d’yeux pour Guido : il est assailli par les questions que réclame la production en cours et épié par les patients de la cure qui le dévisagent du fait de sa notoriété. De sorte que cette ronde est un cercle qui l’emprisonne. Un des enjeux du film sera pour lui de devenir le maitre de cérémonie du tourbillon ambiant en dirigeant lui-même le mouvement du cercle, en redevenant metteur en scène, ce qu’il parviendra à faire à la fin. Truffaut disait que c’était un des films qui montraient le mieux la difficulté de faire un film – peut-être que s’il n’y avait pas eu 8 1/2, il n’y aurait pas eu La Nuit Américaine (1973), du moins sous cette forme là. Mais réduire 8 1/2 à un film sur la création et ses difficultés serait manquer l’essentiel. 8 1/2 est d’abord pour Fellini un plaidoyer pro modo où il affirme son credo cinématographique et ensuite, sur un plan plus personnel, une déclaration d’amour à sa femme Giulietta.

Dans le film, Guido travaille avec l’écrivain français Daumier, un intellectuel pédant et ennuyeux qui ne cesse de lui reprocher la faiblesse théorique de sa pensée, affirmant que « le cinéma a cinquante ans de retard sur les autres arts » et se moquant des symboles figuratifs que Guido veut insérer dans son film. Ce qui l’insupporte en particulier, c’est le désir de Guido d’évoquer des souvenirs d’enfance, désir qui lui parait infantile et sans utilité pour les débats théoriques et politiques de l’époque. Ce type de figure intransigeante est très représentatif des débats intellectuels d’alors et Fellini était régulièrement critiqué pour son absence de positionnement politique en particulier vis-à-vis du marxisme qui fondait l’horizon d’une partie significative de l’intelligentsia et du milieu du cinéma (d’où sa rivalité médiatique avec Visconti qui était lui communiste auto-proclamé).

A ces considérations abstraites et partisanes, Fellini oppose la primauté du rêve et des souvenirs d’enfance, ce qui d’un certain point de vue est presque la même chose. Fellini, qui suivait une psychanalyste jungienne, était un fidèle des enseignements de Jung. Or, pour ce dernier, les mythes sont le langage du rêve, mais aussi le langage de l’enfance de l’humanité, ce qui autorisait une analogie entre les fantasmes de l’enfant, les mythes antiques et les rêves. A cette aune, lorsque nous rêvons, nous réutiliserions sans le savoir le langage commun de l’humanité primitive qui survit en nous. Dès lors, lorsque Fellini filme ses souvenirs d’enfance dans Huit et demi, ce ne serait pas sous l’effet d’une nostalgie infantile du paradis perdu de l’enfance qui n’aurait de sens que pour lui, mais en prétendant s’adresser par le langage du rêve à ses spectateurs qui peuvent le comprendre intuitivement.

De fait, les deux scènes de souvenirs d’enfance de Guido comptent parmi les plus belles du film. La première montre Guido au bain avec sa mère, qui le couche ensuite tendrement, lui le plus beau de ses enfants. Sa grande soeur, dans leur chambre, lui propose ensuite de trouver un trésor dont le sésame est la formule Asa Nisi Masa (code secret faisant référence à l’anima de Jung, soit la représentation de la femme dans l’imaginaire collectif de l’homme). Le second souvenir a trait aux premiers émois érotiques de Guido écolier assistant à la danse lascive d’une femme aux formes généreuses sur une plage, la Saraghina. Surpris par les prêtres de son école catholique, Guido est vertement sermonné : le pêché de chair serait un pêché mortel et la Saraghina « le diable ». Ces deux scènes ne servent pas seulement à nous donner une idée de la psychologie fellinienne, elles illustrent aussi la psyché collective italienne de l’époque dans sa représentation de la femme (à la fois mère tendre et tentatrice) et de l’église (mère du sentiment de culpabilité). Ainsi que le lui reproche le prélat du film, Fellini mêle l’amour sacré et l’amour profane, et peu lui importe qu’il se fasse « complice » ce faisant de la conscience catholique italienne comme l’affirme Daumier.

Claudia Cardinale, qui apparait régulièrement à Guido sous la forme d’un ange de la jeunesse et de la pureté, représente ici l’idéal féminin tel que Fellini se le figure – l’actrice possède en même temps quelque chose d’innocent et quelque chose de charnel. Voilà qui peut paraitre simplificateur, et pourtant c’est par l’usage de ces représentations simples que le film touche à l’universel. Il en va de même dans le rêve du début, chacun peut comprendre, sans avoir besoin de lire Jung, que cet homme coincé dans un embouteillage et qui s’envole soudain dans le ciel représente l’aspiration à la liberté que l’on peut ressentir pendant sa vie quand les responsabilités et les attentes se font trop pressantes. Aussi bien, quand Daumier déclare qu’« il faut en finir avec les symboles, la pureté, l’innocence, l’évasion », Fellini se prémunit par avance contre la critique du symbolisme en l’intégrant au film et en montrant, en guise de réponse, ce que ces symboles ont de beau et d’attachant. Les rêves du film semblent souvent se dérouler sur une scène, grâce à des plans larges à l’impressionnante profondeur de champ, ce qui leur confère cette dimension symbolique qu’acquièrent les gestes tendrement répétés. Ils sont moins rêves compensatoires que sublimation par l’art de la duplicité coupable de Guido. Dans quel but ? Nous y venons.

Car l’autre versant du film est des plus intimes : Fellini met en scène sa propre infidélité et ses démêlés conjugaux. C’était un mari volage et de l’avis de son biographe italien Tullio Kezich qui le connaissait, Carla (Sandra Milo), maitresse de Guido dans le film, possédait les formes d’Anna, la maitresse de Fellini. Les scènes entre Guido et sa femme Luisa (Anouk Aimée) font aussi écho aux disputes de Fellini avec sa femme Giulietta Masina qui connaissait ses aventures, de même que le tout cinéma italien. D’aucuns trouveront peut-être impudique d’étaler ainsi sur la place publique ce qui devrait appartenir aux secrets du foyer. Objection valable sur le plan des principes mais qui ne tient pas compte du contexte : puisque les frasques de Fellini étaient de notoriété publique autant tâcher de se faire pardonner sans plus cacher ce qui ne peut l’être. Certes, Fellini a la complaisance d’avoir choisi pour alter ego le plus bel acteur italien et Mastroianni fait assaut de charme tout le film durant. Mais la crise artistique qu’évoque le film renvoie à la crise existentielle et conjugale que traversait Fellini dans la réalité et cette mise en abyme contribue à rendre le film émouvant et sincère. Reste-t-on menteur quand on se confesse menteur, l’absolution (qu’accorde l’Eglise justement ; on en revient à la conscience catholique italienne) est-elle possible ?

Si l’on pose l’hypothèse que Huit et demi est véritablement la confession publique de celui que l’église traita de « pêcheur public » à la sortie polémique de La Dolce Vita, alors on peut voir que Fellini ne s’y ménage pas. Guido est entouré de femmes qu’il traite avec bien peu d’attentions comme l’atteste le célèbre rêve du harem, scène un peu longue du reste, qui est sauvée par son humour et sa chute où le sort d’une vieille actrice en devient le vrai sujet. Voyez aussi les scènes entre lui et l’actrice française censée jouer un rôle dans le film de science-fiction qu’il prépare. Elle lui demande de quoi son rôle retourne, puis devant son mutisme, essaie tant bien que mal d’attirer son attention, se justifiant de ses choix, évoquant le couperet de l’âge pour une actrice. Lui demeure indifférent, absent, l’humiliant par ses silences et sa manière de se défausser systématiquement sur un autre. Voyez encore la scène du café avec Luisa où il s’emporte en assurant que tout est fini entre lui et sa maitresse depuis trois ans alors qu’elle se trouve assise à quelques mètres de distance, attendant l’occasion. Maitresse dont il semble d’ailleurs tenir l’intellect en piètre estime.

Or, après s’être ainsi assigné le mauvais rôle, Fellini/Guido demande à sa femme de patienter encore un petit peu dans le dernier tiers du film, de supporter une dernière fois ses frasques car ce seront ses dernières une fois qu’il aura appris de nouveau à vivre. Il lui demande pardon car c’est par elle qu’il peut réapprendre à vivre. Une scène en particulier supporte cette interprétation. Toute la troupe se retrouve sur le plateau du film que doit réaliser Guido, qui en a oublié le sujet. Or, ce plateau où se trouve une fusée, est situé sur une plage, comme à la fin de La Dolce Vita. Dans ce dernier film, le visage d’une jeune fille portait l’espérance que la vie pouvait peut-être, malgré tout, recommencer pour Marcello. Dans 8 1/2, c’est le visage de Luisa, la femme de Guido/Fellini qui joue ce rôle, c’est son visage que la caméra recherche à cet instant car c’est elle l’espérance. Disparue, la femme idéale incarnée par Claudia Cardinale, réduite au rôle de figurante la maitresse opulente jouée par Sandra Milo. Luisa revient au premier plan, peut-être prête à pardonner : elle accepte de rentrer de nouveau dans la ronde de la vie orchestrée par Guido. Et Guido/Fellini de pouvoir enfin redevenir le metteur en scène de sa propre vie, porte-voix à la main, ce porte-voix qu’il maniait sur les plateaux, alors que retentit la fanfare de la splendide musique de Nino Rota. Il faut croire que Giulietta trouva ce film génial convaincant, au moins à moitié, puisqu’elle ne quitta pas son mari, lequel allait même lui offrir un de ses plus beaux rôles dans le très beau Juliette des Esprits (1965), pendant féminin de 8 1/2 où ce sont cette fois les rêves des femmes qui sont mis en scène. Une idée fort jungienne là aussi.

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L'Oeil sur l'écran

Huit et demi (1963) de Federico Fellini

TITRE ORIGINAL : « 8 1/2 »

Huit et demiRéalisateur connu dont on attend le prochain film, Guido est en proie à une crise de la quarantaine particulièrement aigüe. Tout s’embrouille pour lui. Ecartelé entre plusieurs femmes, ne sachant plus faire la part du rêve et de la réalité, il est harcelé par les acteurs et les intervenants de son prochain film qui devait être en grande partie autobiographique mais auquel il ne sait plus quelle direction donner… Huit et demi (le titre original était La Bella ConfusioneLe Beau Désordre) est le film le plus autobiographique de Federico Fellini : le cinéaste a connu une crise similaire pendant le tournage de La Strada. Ce qui, en d’autres mains aurait été d’une déprimante tristesse, devient avec Fellini une grande fresque tourbillonnante et foisonnante sur les affres de la création et, surtout, sur la recherche de l’équilibre intérieur. Souvenirs, rêves et fantasmes sont l’occasion de superbes scènes, fééries qui sont les seules à apaiser l’esprit tourmenté de Guido. La fin peut s’interpréter de plusieurs façons (1). Claudia Cardinale, en idéal fantasmé d’une fraîcheur perdue, est d’une beauté virginale. L’image de Mastroianni avec chapeau et lunettes est devenue iconique. Le thème final de Nino Rota est aujourd’hui l’une des musiques des plus célèbres de toute l’histoire du cinéma. Huit et demi fait partie de ces films que l’on peut voir et revoir avec toujours le même plaisir.
Elle4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Remarque :

* Plusieurs explications ont été avancées pour le titre du film. La plus couramment acceptée est que Fellini avait auparavant réalisé 6 films et 3 « demi-films » (coréalisations, films à sketches). Huit et demi est donc son « huitième et demi » film… Mais 8 1/2 pourrait aussi être l’âge du jeune Guido lors de ses premiers émois sexuels, le nombre de bobines du film ou encore la focale d’ouverture utilisée sur la plage d’Ostie. Une dernière explication : le chiffre 9 représenterait la maitresse de Guido (cf. Bus 99 dans la scène d’ouverture juste avant de la voir dans une voiture), le chiffre 8 représenterait la femme de Guido (cf. 8 8 ostensiblement présent sur plusieurs affiches lors de sa première apparition), or Guido est écartelé entre ces deux femmes, d’où le 8 1/2. Même si cette dernière explication peut sembler alambiquée, ces chiffres ne sont pas là par hasard…

(1) Tullio Pinelli, coscénariste, a raconté qu’initialement Fellini avait prévu de terminer son film par un suicide sous la table.

huit et demi
Marcello Mastroianni dans Huit et demi de Federico Fellini.

Huit et demi
Claudia Cardinale dans Huit et demi de Federico Fellini.

Huit et demi
Anouk Aimée (avec le fameux chiffre 8 en arrière plan) dans Huit et demi de Federico Fellini.

4 réflexions sur « Huit et demi (1963) de Federico Fellini »

  1. La scene d’ouverture du film est ma preferee de tous les films que j’ai vus et est d’une force enorme. Guido coince dans un embouteillage dans un tunnel romain, il tente de sortir de sa voiture desesperement alors que de la fumee envahit l’habitacle du vehicule et tous les gens autours le regardent et ne font rien et puis il s’evade on ne sait trop comment pour se retrouver en cerf-volant avant de chuter dans la mer et de se reveiller. C’est bien simple, j’adore et je ne me lasse jamais de voir cette scene quand je revois le film ou de la revisualiser dans ma tete comme je le fais actuellement alors que j’ecris ces lignes. Il y a ce plan magnifique ou on voit la silhouette de Mastroianni, tout de noir vetu, avec son chapeau et son echarpe flottant au vent, qui glisse litteralement sur les voitures embouteillees et sort du tunnel pour s’envoler. C’est tellement beau visuellement! Et puis, on entend le vent qui est le seul son accompagnant cette scene. A ce sujet, je n’ai jamais lu quelque part que l’on retrouve tres souvent dans les films de Fellini le son du vent qui souffle, ce qui est curieux car c’est une constante dans son oeuvre.

    Cette scene d’ouverture est grandiose et est une superbe entree en matiere pour un film qui est un des plus beaux du cinema et une tres magnifique reflexion sur les affres de la creation. Comme dans la chanson de Brigitte Bardot, je manque d’adjectifs pour qualifier ce film.

  2. films

  3. Oui, il est vrai que c’est une scène très forte, surtout qu’elle arrive presque brutalement après un générique très court. La sensation de rêve est particulièrement prégnante avec ce comportement étrange des autres personnes, si particulière aux rêves.
    Amusant ce que vous dites sur le vent. Il faudra que j’y fasse attention…

  4. TEMPETE SOUS UN CRANE
    ou L’angoisse du cinéaste au moment du nouveau film

    A la suite du succès planétaire de La dolce vita, Fellini démarre une analyse et se demande bien ce qu’il va pouvoir faire pour continuer sur ces hauteurs. il se creuse le cigare, entrevoit bien quelque chose, mais c’est compliqué à définir, à écrire, à tourner, à monter. il va prendre comme acteur porte parole un alter égo, ce Marcello qui fut le chroniqueur mondain romain lui servant de fil rouge dans les déambulations de La dolce vita, et cette fois ci c »est dans la tête de ce nouveau personnage – Guido – que nous déambulerons, dans les affres de sa douloureuse création avec les personnes/personnages de son présent, de son passé, de son enfance, de sa fiction en panne qui s’abreuve à sa vie personnelle, car il est cinéaste célèbre, et comme tel, on l’attend au tournant
    Tout le monde attend, monopolisé par ce film à venir mais qui ne se fait pas et dont nous voyons un nombre impressionnant de bouts d’essais déjà tournés et imaginés. Notre homme fragilisé, dans le doute, en cure dans une station thermale balnéaire, lunettes noires et yeux cernés,file un mauvais coton dépressionnaire. Ca ne tourne plus rond
    De l’intro au final, on est sous le coup d’un film qui donne le vertige
    Donc Guido/Marcello s »est substitué au maestro, comme aujourd’hui Banderas à Almodovar. Guido répète plusieurs fois qu’il a 43 ans, l’âge de Federico
    Ce qui stupéfie encore aujourd’hui – c’était déjà en 1963 d’une déconcertante nouveauté – est l’essence virtuose de la conduite de ce récit d’un arrêt
    Que faire? Quoi faire? Comment faire? La réalité se dérobe sous ses pieds, seul le monde intérieur de Guido le guide « Je n’ai rien à dire, mais je veux le dire » finit- il par avouer, le traître, et s’il disait vrai, pour pallier d’avance toute critique? Ce serait assez dans l’esprit du maestro
    Coincé dans sa voiture dans un grand embouteillage sous un tunnel, Guido/Marcello/Federico s’étouffe, s’échappe, cauchemarde…
    La photo de Gianni di Venanzo qui tire sur les contrastes en en faisant un film plus blanc et noir que noir et blanc, les costumes, chapeaux et décors de Pietro Gherardi (oscarisés), et la célèbre musique de Nino Rota ajoutent à ce cauchemar éveillé ponctué de plages poético baroques, d’humour noir et de férocité
    Le nombre impressionnant de personnages fait la part belle aux femmes « de sa vie », l’épouse, la maîtresse, la belle-soeur, la mère, la jeune fille pure, l’actrice angoissée, la sorcière de la plage, la meneuse de revue sur le retour, déjà toute une cité des femmes, ici un harem dans une séquence d’anthologie onirique avec Marcello fouet à la main, enveloppé d’un drap
    Après une fausse fin qui aurait pu tourner au tragique, une apothéose nouvelle sonne comme une parade de cirque toute blanche annonçant un nouveau départ, transformant l’échec en un essai réussi : Fellini est prêt à tourner un 9ème film. Les américains qui en raffolent (plusieurs oscars) en feront un remake musical à leur manière : Nine (joli clin d’oeil)

  5. J’ai l’age de ce film et je me souviens encore de la première fois ou je l’ai vu.
    Entre 15 et 20 ans très tard le soir
    Amusé par l’autodérision de Guido
    Étonné par les personnages qui l’entourent et qui peuplent ses rêves et phantasmes ; les flashes backs (Boris et d’autres)
    Séduit par la subtilité des dialogues , des jeux , des lumières ; le noir et blanc !
    Émerveillé par l’issue des 8 derniers minutes qui sont prodigieusement réalisées
    Bercé par cette fabuleuse musique de Nino Rota , presque drôle , presque lancinante , un peu clownesque , magique , inégalée
    il m’arrive encore de le regarder plus de 35 ans après et de le re-regarder comme un tableau de la Renaissance Italienne dont on ne peu se lasser
    De la poésie en image , de l’humour jusqu » a dans la musique (les Walkyries au début de la cure )
    Une œuvre inspirée , très attachante

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  7. Huit et demi

     

    (Otto e mezzo, 8 1/2). Avec : Marcello Mastroianni (Guido Anselmi), Claudia Cardinale (Claudia), Anouk Aimée (Luisa Anselmi), Sandra Milo (Carla), Rossella Falk (Rossella), Barbara Steele (Gloria Morin) Mario Pisu (Mezzabotta), Guido Alberti (Pace, le producteur), Madeleine LeBeau (Madeleine, l'actrice française), Jean Rougeul (Daumier, le scénariste), Eddra Gale (la Saraghina), Mario Gemini (Guido enfant, au collège), Riccardo Guglielmi (Guido, enfant), Caterina Boratto (la femme mystérieuse), Annibale Ninchi (le père de Guido), Giuditta Risson (la mère de Guido), Tito Masini (le cardinal). 2h18.
     
     

     Septembre 1962. Il fait chaud et lourd à Rome. A la sortie d'un tunnel, la circulation est paralysée par un gigantesque embouteillage. À l'intérieur d'une des voitures immobilisées, un homme suffoque, l'habitacle est envahi de fumée et pas moyen d'ouvrir porte ou fenêtre. Les passagers des autres véhiculent l'observent indifférents. L'homme grimpe sur le toit s'élève dans les airs. Attaché à un filin comme un cerf-volant, il survole une plage. Un homme maintient l'autre bout de la corde et un étrange cavalier lui ordonne de procéder à la chute mortelle : ce qui fait tomber comme une pierre l'homme des airs dans la mer.

    Ce n'était qu'un cauchemar. Guido Ansemi, réalisateur célèbre de 43 ans, est en cure de repos dans un établissement thermale où on lui prescrit de l'eau et des bains de boue. Daumier, un intellectuel qu'il a fait venir pour revoir son scénario, préfère lui donner rendez-vous à la source thermale. Là se rassemblent les curistes alors qu'un orchestre joue la chevauchée des Walkyrie et un air du Barbier de Séville de Rossini. Alors que Guido s'approche des infirmières qui distribuent l'eau thermale, il baisse ses lunettes de soleil et voit apparaitre la belle Claudia, toute de blanc vêtue qui lui tend un verre d'eau. L'apparition cesse bientôt. Guido discute alors avec Daumier qui reproche au scenario existant de manquer de problématique ou de prémisses philosophiques. Ce qui fait du film une suite d'épisodes gratuits voire amusants, en raison de leur réalisme ambigu. On se demande ce que veulent les auteurs. Pauvreté de l'inspiration poétique, preuve la plus pathétique que le cinéma a 50 ans de retard sur tous les autres arts. Le sujet n'a même pas la qualité d'un film d'avant- garde, alors qu'il en présente tous les défauts. Guido ne sait plus pourquoi il veut faire le film. Il aperçoit alors son ami Mario Mezzabotta. Il est en compagnie de Gloria Morin, étudiante en philosophie aspirant à devenir actrice. Il attend l'annulation de son mariage qui dure pourtant depuis onze ans. A la gare, Guido lit les commentaires peu amène de Daumier sur son scenario (les apparitions de la jeune fille à la source que signifient-elles ? Une offre de pureté, de chaleur; de tous les symboles de votre histoire, celui-ci est le pire) en attendant Carla sa maîtresse qu'il a logé secrètement et modestement à l'hôtel de la gare. Ils font l'amour puis, alors que Carla lit des bandes-dessinées, il voit sa mère en rêve. Elle nettoie la tombe du père; celui-ci lui apparait aussi se plaignant d'être un peu à l'étroit dans son tombeau. Il demande des nouvelles de son fils au producteur Pace et à Conocchia, le directeur de la production et lui souhaite de continuer à être heureux avec sa femme; il s'enterre, la mère s'approche, embrasse son fils sur la bouche, c'est Luisa qui apparait alors, meurtrie qu'il ne l'ait pas tout d'abord reconnue.

    Guido rentre à son hôtel. Dans l'ascendeur, il croise le cardinal alors que dans le hall Agostini, son assistant lui présente trois petits vieux attendent pour le rôle de son père. Arrive Cesare, l'impresario de Claudia, Conocchia s'inquiète du cout de l'aéronef, Madeleine et son impresario et Carini, un critique cinéma accompagné de sa femme qui écrit pour un journal féminin et une femme mystérieuse en blanc; Le producteur accompagné de sa starlette qui lui offre une montre

    Soirée de gala devant la source. Mario et sa jeune fiancée dansent. Le critique l'interroge sur le lien entre catholicisme et marxisme. L'Italie est-elle, oui ou non, foncièrement catholique ? Madeleine est très déçue de n'être prévue que pour pas davantage que cinq à sept scènes. Carla solitaire mange une glace alors que le critique demande s'il pourrait créer une œuvre vraie, importante et belle à la demande du pape. Un magicien avec son acolyte, Maria, devine les pensées des invités ce qui les fait fuir. Guido s'y prête il pense à "Asa Nisi Masa" (Anima sans les sa si javanais). A cinq ans, il ne voulait pas du bain de vin, censé donner des forces. La nuit da sœur lui avait dit que le portrait de la chambre allait s'animer et la direction de ses yeux indiquer le trésor caché.

    Guido rentre à son hôtel où on lui indique que sa femme a appelé. Il retrouve madeleine inquiète pour son rôle et Mezzabotta qui joue du jazz pour sa compagne. C'est Rossella l'amie de Luisa qui lui parle au téléphone puis celle-ci qu'il invite sur le tournage. Rend visite à l'étage de la production. Joyeux mais Conocchia renonce. En rentrant dans sa chambre, il se demande si la crise d'inspiration n'est que passagère. Mais Claudia surgit de derrière les rideaux et lui prépare le lit avec dévotion. Elle serait donc pureté, spontanéité. Il l'imagine fille de gardien de musée. Elle en rit lui aussi, elle le borde et s'allonge : elle est venue pour ne plus repartir et mettre de l'ordre, faire place nette. Mais Carla l'appelle au téléphone l'eau médicinale l'a rendu malade. Il se rend sur place mais s'inquiète surtout sur ce qu'il devra dire demain au cardinal. Il veut faire se rencontrer son personnage principal avec un prince de l'église lors d'un bain de boue .Il y apprendra une vérité qu'il réfute bien qu'elle le fasciné .saint Paul sur le chemin de Damas pense l'entourage du cardinal, surtout intéressé par l'oiseau Diomède. Une femme du peuple lui fait penser à ses huit ans au collège. Ses camarades l'entrainèrent pour voir la Saraghina, grosse femme sauvage vivant dans un bunker sur la plage danser la rumba pour quelques sous. Dans une poursuite burlesque, il avait tenté d'échapper aux curés. Il avait finalement dû affronter un tribunal ecclésiastique où sa mère avait pleuré puis condamné à l'écriteau "honte" porté sur le dos puis à l'humiliation devant ses camarades au réfectoire s'était confessé puis était venu dire adieu à la Saraghina sur la plage

    Daumier en interroge le sens : juste un souvenir d'enfance rien à voir avec une conscience critique, sur le catholicisme en Italie, niveau culturel trop bas, sa tendre ignorance est trop négative souvenirs baignés de nostalgie, vos évocations naïves et émotives sont celles d'un complice, il faut être un Suétone au temps des césars (le cardinal plaisante) et non partir avec l'ambition de dénoncer pour aboutir à la connivence du complice. "Quelle confusion, quelle ambigüité !" conclut-il.

    La cure de ce matin-là ressemble bien aux thèmes romains, le producteur lui demande d'être clair dans l'explicitation de son thème : la confusion dans l'esprit d'un homme. Rêve ou réalité: Guido est appelée pour voir le cardinal. Son assistant lui demande d'intercéder pour des dispenses. Guido confie n'être pas heureux, ce n'est pas une finalité réplique le cardinal, hors de l'église point de salut

    Au Grand hôtel La Ponte, il y a concert. Dans la rue, Guido retrouve Luisa devant une salle des ventes. Elle est venue avec Rossella, Enrico, son soupirant, et Tilde. Le soir ils dansent ensemble heureux puis, soudain, alors que le départ pour l'astronef s'organise, son humeur s'assombrit.

    L'astronef mesure maintenant 70 mètres et doit être prêt pour le 20, 400 tonnes de béton armé sur le sol de sable pour 80 millions de lires (10 appartements). Sur une terre ravagée par la guerre nucléaire, l'astronef fuit la peste atomique, l'humanité cherche asile sur une autre planète plus de 10 000 figurants.

    Le soir à l'hôtel, Luisa lui explique qu'elle a vu Carla; ils s'endorment fâchés. Le lendemain Carla est sur la place, il nie l'avoir fait venir. Puis, il s'imagine que les deux femmes se rencontrent et s'apprécient. Sa vie est comme dans un grand harem où il distribue les cadeaux. Sa femme lave le sol et l'aime et sont là toutes les femmes de sa vie même une hawaïenne que Luisa lui a ramené car il en parlait. Jacqueline a 28 ans. Elle doit être conduite à l'étage du dessus. Toutes les femmes vont dormir et Luisa lave encore.

    Dans le théâtre de la ville on visionne les rushes. Guido ne sait pas choisir. En rêve Il pend Daumier. Les essais ne sont pas très convaincants. Tous s'énervent mais arrive Carla, il l'emmène se promener en voiture puis sur une place où il tente de lui expliquer son rôle.

    C'est la conférence de presse du premier jour de tournage. Guido est tétanisé. Il rêve qu'on lui procure un revolver pour se suicider sous la table. Il renonce. Daumier le conforte dans son abandon prônant le choix de la page blanche pour l'intellectuel responsable.

    Mais le magicien arrive et le félicite et Claudia apparait. Daumier tente vainement de le décourager de recoudre les lambeaux de sa vie : ces vagues souvenirs des visages des êtres qu'il n'a pas su aimer. Mais Guido suit le magicien : "Quel est ce bonheur qui me fait trembler, me redonne force et vie ? Pardon douces créatures, je n'avais pas compris, je ne savais pas qu'il est naturel de vous accepter, de vous aimer et que c'est simple. Luisa je me sens délivré. Tout me semble bon, tout a un sens, tout est vrai j'aimerais tant pouvoir t'expliquer mais comment ?"

    Et voilà que tout redevint comme avant tout est de nouveau confus. Le magicien fait allumer les projecteurs et Guido réaffirme alors : "Mais cette confusion, c'est moi. Moi tel que je suis et non tel que je me voudrais et cela ne m'effraie plus. Dire la vérité, ce que j'ignore, que je cherche, que je n'ai pas trouvé. Ainsi je me sens en vie, je peux regarder sans honte tes yeux fidèles. La vie est une fête. Vivons-là ensemble. Je ne peux mieux dire, Luisa à quiconque. Accepte-moi tel que je suis si tu peux. C'est le seul moyen de nous retrouver". Luisa lui répond :"J'ignore si tu as raison mais je peux essayer".

    Tous apparaissent père et mère, Carla. Guido a compris qu'il ne pouvait se passer d'eux tous. Il monte dans la ronde avec Luisa. C'est la nuit, le jeune Guido continu de diriger ses clowns au son de sa flûte.

     

    Durant son tournage, le film s'appelait La bella confusione (Le beau désordre). Le titre énigmatique qu'il a pris ensuite renvoie peut-être à sa place dans l'œuvre de Fellini. Il venait en effet après sept long-métrages et les sketches Agence matrimoniale de L'amour à la ville et La tentation du docteur Antonio de Boccace 70 qui, au vu de leur durée, ne comptaient ensemble que pour un demi-film. Il est aussi possible que le titre fasse référence au nombre de bobines 35 mm sur lequel il était impressionné une fois fini. Chaque bobine dure en effet entre 15 et 20 minutes. On notera cependant que le film aurait pu tenir sur huit bobines et qu'il aurait fallu attendre la toute fin de la production pour avoir une telle idée. Or il semble bien que Fellini fasse une discrète allusion à ce chiffre de huit et demi dans le film lors des premières présentations de Carla et Luisa.

    Une troisième explication du titre, bien que cryptée, est plus autobiographique. Dans le prologue-cauchemar, un homme dans une voiture caresse une femme qui se pâme. C'est Carla, la maîtresse de Guido. Au-dessus d'eux, les passagers d'un bus dont le numéro est 99. Plus tard, la première apparition de Luisa a lieu devant une salle des ventes dont l'affiche montre deux chiffres : 88. La graphie de l'affiche redouble l'idée de la barre de moitié (1/2) qui coupe les deux silhouettes contenues dans le vide des deux ronds du huit. Guido, en ne choisssant pas entièrement entre sa maîtresse et sa femme n'aura que la moitié de chacune d'elle, du 9 comme du 8, et restera partagé entre elles.

    Le bus du prologue-cauchemar : 99
     
    Première appartion de Luisa : 88

    Sans doute Fellini, qui a mis énormément de lui-même dans le film, n'a-t-il pas voulu exhiber cette allusion trop personnelle en orienter vers un titre qui pouvait apparaitre comme faisant juste référence à sa filmographie de son œuvre propre.

    Esthétique et morale de la fragmentation.

    Le fil narratif du film est constitué par le calvaire que représente pour Guido, en panne d'inspiration, d'achever le scénario et le casting de son film alors que le début du tournage est imminent et qu'il est sollicité par l'équipe de production et les stars et leurs impresarios. Il en a même rajouté en faisant intervenir un intellectuel, Daumier pour, croit-il, l'aider à terminer son scenario et qu'en rêve il pendrait bien et en invitant sur le tournage sa femme et sa maitresse.

    Au terme d'un tumultueux examen de conscience, Guido apaisé, invite tous ses compagnons de route (réels ou rêvés) à participer à une joyeuse farandole au centre de laquelle un enfant tout de blanc vêtu joue du pipeau. Cet enfant, c'est lui.

  8. ============================================================

  9. 11 août 2018

    8 1/2 (Le chef d'oeuvre de Federico Fellini ?)

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    Genre : Drame, fantastique; Année : 1963; Durée : 2h18

    Synopsis :

    Guido Anselmi, un cinéaste réputé, suit une cure de repos dans une ville d'eau. Pour son prochain film, qu'il ne sait comment démarrer, il écoute les conseils de ses amis. Le tournage commence mais, subitement, Guido n'est satisfait de rien. Les doutes l'assaillent. Luiza, sa femme, Carla, sa maîtresse, Claudia, l'inaccessible beauté qu'il doit prochainement diriger : les visages féminins se mêlent. Guido s'évade dans des visions. Il revoit des épisodes de son enfance, des souvenirs de jeunesse, il rêve et chevauche allègrement réalité et songe.

     

    La critique :

    Il y a quelques temps déjà, Cinéma Choc voyait arriver la toute première chronique portant sur l'un des cinéastes les plus réputés, non seulement d'Italie mais aussi de l'histoire du cinéma, en la personne de Federico Fellini. Reconnu à l'international en 1954 avec La Strada (que j'avoue ne pas avoir été plus emballé que ça), c'est le début d'une grande notoriété publique voyant l'entrée d'un géant dans le cinéma transalpin. Suivront en 1955, Il Bidone et en 1957 l'excellent Les Nuits de Cabiria. La consécration ultime, vous vous en doutez, sera en l'an de grâce 1960 avec la Palme d'Or attribuée au légendaire La Dolce Vita. Vu comme une rupture avec le néoréalisme, les critiques commencent à parler du "baroque fellinien", beaucoup trop fourni et complexe pour définir toutes les caractéristiques dans cette chronique. Cet énorme succès lui permettra de réaliser, trois ans plus tard, son film le plus personnel et le plus ambitieux. C'est le film présenté aujourd'hui au nom énigmatique de 8 1/2.
    C'est le quatrième détenteur de l'Oscar du meilleur film en langue étrangère pour Fellini, un record partagé avec Vittorio De Sica. Plus encore, il est considéré comme l'un des meilleurs films de tous les temps.

    Outre l'Oscar, il remporte de nombreux prix, à sa sortie. On s'attardera à mentionner les 7 Rubans d'Argent dans la catégorie du meilleur réalisateur, meilleur producteur, meilleur sujet, meilleur scénario, meilleure photographie, meilleure musique et meilleure actrice dans un second rôle. Impressionnant n'est-il-pas !! Inutile de continuer dans la mention des différentes distinctions car, les exemples là témoignent amplement du potentiel inconsidérable d'un tel projet. Reste un point que certains se seront sans doute posés : Pourquoi un tel titre ? La réponse est bien plus simple (je n'ose dire bête à manger du foin) qu'elle n'y paraît. Jusqu'à 1963, Fellini a réalisé 7 long-métrages et 3 coréalisations les considérant comme des demi-films. Faites l'addition et vous obtiendrez 8,5 donc 8 1/2. Pourtant, ce titre n'a pas été choisi dès le début, vu que son nom d'origine était La Bella Confusione (Le Beau Désordre).
    Evidemment, une telle distinction mâtinée de critiques unanimement dithyrambiques aura marqué au fer rouge l'histoire cinématographique. Ainsi, vous serez étonné de savoir qu'il fera l'objet d'un... remake, je vous rassure, canadien, sous la forme d'une série télévisée nommée MoreTears, en 1998. Dans la foulée, une adaptation, en 1982, suivra à la scène de Broadway sous forme de comédie musicale intitulée Nine. Mouais... Une fois de plus, c'est un défi supplémentaire à rajouter à mon modeste palmarès de chroniqueur. Et au vu de la complexité et de la richesse de cette pellicule, ce n'est pas gagné d'avance !

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    ATTENTION SPOILERS : Un cinéaste dépressif fuit le monde du cinéma et se réfugie dans un univers peuplé de souvenirs et de fantasmes. Surgissent des images de son passé, son enfance et l'école religieuse de sa jeunesse, la Saraghina qui dansait sur la plage pour les écoliers, ses rêves fous de « harem », ses parents décédés. Dans la station thermale où il s'est isolé, son épouse Luisa, sa maîtresse Carla, ses amis, ses acteurs, ses collaborateurs et son producteur viennent lui tourner autour, pour qu'enfin soit réalisé le film sur lequel il est censé travailler.

    Personnel : voilà le mot qui sera le fil conducteur pour une meilleure compréhension d'un des long-métrages, et je n'ai pas peur de le dire, les plus ambitieux de l'histoire du cinéma italien. En mettant en scène Guido Anselmi, un réalisateur, Fellini se permet de grandes ambitions en voulant retranscrire la vie personnelle d'un cinéaste en manque d'inspiration, ne sachant pas trop où aller. 8 1/2 témoigne de la panne d'idées, soit la hantise de tout cinéaste un tant soit peu sérieux (on évitera de parler des semblants de cinéastes à la botte du Hollywood actuel). Anselmi a une idée de film, en l'occurrence un film axé sur la science-fiction avec présence d'extraterrestres. Un projet osé, ambitieux mais qu'il n'arrive pas à cerner pour créer le film qui lui plaira. Son producteur lui dira clairement qu'un film doit avant tout plaire au public. Dans l'absolu, ce n'est pas faux mais le problème est de devoir juguler entre la qualité formelle et l'accessibilité du récit au peuple. C'est une balance fragile qui est très complexe à mettre en place et peu en sont arrivés. A travers cette perdition mentale, un prolongement introspectif va s'effectuer dans sa tête. Sa perdition dans son métier va se répercuter sur sa propre vie et ses actes passés.
    C'est donc une perdition existentielle qui va s'opérer. Désincarné d'un projet dans lequel il ne se reconnaît plus, il s'évade, ressassant un passé résolu envers lequel il cherche à s'accrocher. Un passé torturé dont l'enfance est imbriquée dans une éducation fortement ancrée dans l'éducation catholique. Une éducation rigide, impassible envers une certaine forme d'émancipation morale. Guido, dès son plus jeune âge, ne se reconnaît pas là-dedans. En compagnie de ses amis, il va retrouver une liberté en parcourant les dunes pour tomber sur une femme plantureuse aux moeurs légères exécutant la rumba en échange d'un petit pécule. 

    Il est difficile de savoir si Fellini opère ou non une subtile critique du pouvoir religieux emprisonnant ses nouveaux éléments. Toujours est-il que Guido va s'abandonner hors du catholicisme, attiré, dès son plus jeune âge, par les femmes. Le cliché de l'italien romantique dans toute sa splendeur. Il a une femme mais ça ne l'empêche pas d'avoir des maîtresses, de regarder abondamment certaines femmes qu'il n'a jamais mis dans son lit. Il n'est pas l'homme exemplaire et aime se fourvoyer dans les infidélités. Le fait de mettre en scène un état de fait pareil ne tient pas du hasard. Comme je l'ai dit, Anselmi vit dans une optique d'émancipation de la religion. Comme nous savons que l'Eglise est très rigide sur la thématique de la relation amoureuse avec le mariage, la virginité devant être gardée jusqu'au mariage, les enfants et tout le tralala, il fuit cela. Il en est son antithèse.
    Il voit, drague des femmes, multiplie les conquêtes et n'a pas d'enfants. Paradoxalement, il compte mettre en relief son passé catholique dans son film, ou du moins une certaine influence. Son passé ne le quitte pas. En fin de compte, ce Guido est un peu ce Monsieur tout le monde se raccrochant à sa jeunesse, retrouvant cette sérénité à visualiser tout ce qu'il a accompli depuis. Néanmoins, à force d'être trop dans le passé, la chute mentale n'en est que plus douloureuse. Entre scènes réelles se succéderont, par le biais de transitions assez brutales, toutes sortes de visions. La vision de ses deux parents décédés, de ses amis d'enfance et le point culminant n'étant autre que cette séquence mémorable du harem où toutes ses conquêtes se retrouveront au même moment dans une unique pièce.

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    On pourrait s'avancer à formuler quelques hypothèses : 8 1/2 serait-il un film autobiographique ? Ou tout du moins une autobiographie en devenir ? Il est vrai que le film retranscrit indéniablement les angoisses de Fellini de voir son inspiration être annihilée par le tourbillon de ses tourments internes. Reste que, en notre for intérieur, Anselmi s'affiche comme un jeune réalisateur, au final, assez quelconque, n'ayant pas marqué de son empreinte le cinéma. C'est un peu l'exact opposé de Fellini dont la consécration s'est déjà opérée avant ce film. OUI MAIS le truc est que l'on ne saura, d'ailleurs, rien sur les oeuvres passées de Guido. Une caractéristique assez surprenante mais pas dénuée d'un coup de génie.
    On serait tenté de dire que ce cinéaste est, comme je l'ai dit avant, assez quelconque mais qui ne dit pas qu'il n'a pas accouché de moult chefs d'oeuvre ? Vous commencez à comprendre la subtilité de la chose ? Dans ce scénario, Guido ne croit pas en son projet et n'a aucune idée de comment lui donner vie mais quid de sa carrière avant cette panne d'inspiration ? Est-il du même niveau qu'un Federico Fellini ? En attendant, l'une des dernières séquences le mettant face à une foule de journalistes semble montrer qu'il est célèbre et que son film suscite l'intérêt des médias.

    Vous comprenez donc que 8 1/2 est l'un de ces films triturant autant la pensée du spectateur qu'il ne le fascine. Il est l'un de ces long-métrages qui fait participer son spectateur en sollicitant son interprétation des faits, bien plus que dans La Dolce Vita auquel on peut l'apparenter à plusieurs reprises. A l'image de Marcello Rubini, Guido Anselmi fait partie de ce milieu mondain. Autre point d'importance témoignant de toute l'érudition de son réalisateur est cette capacité à faire du cinéma dans le cinéma. En dehors de ses fantasmagories, les décors du film sont créés. On pensera à ce gigantesque vaisseau de 60m de haut construit dans un terrain vague. Séquence pour le moins impressionnante. On voit des caméras, des auditions se former. On peut s'avancer à dire que nous serions dans, ce que j'appelle, une variante de cinéma-vérité. Pas LA vérité au sens propre mais une construction imagée de la réalité, en l'occurrence le processus de création d'un film et les difficultés que le réalisateur peut rencontrer. Les exemples dans la vie réelle ne manquent pas.
    On pense à Francis Ford Coppola et ses déboires rocambolesques et difficultés psychologiques pour accoucher de son chef d'oeuvre Apocalypse Now. Dans cet univers singulier, Fellini hypnotise son spectateur et l'embarque dans les songes de Guido. Mieux, il le désarçonne autant que le héros lui-même. On peut observer une réelle implication du cinéphile à vouloir interpréter les faits observés. Forcément, les 138 minutes de bobine ne seront pas de trop pour développer au mieux le récit.

     

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    En parallèle, je suppose que toute personne ayant visionné, à un moment ou à un autre, du néoréalisme italien a dû être frappé par le raffinement esthétique dont il se pare et qui a contribué à sa renommée internationale mais aussi temporelle. Fellini expose toute son érudition avec une mise en scène aux petits oignons avec son lot de plans à tomber par terre devant la grâce, la beauté des décors. Tantôt luxueux, tantôt minimaliste, il varie le style de décors, toujours en suscitant l'intérêt d'observer et de se laisser charmer par les décors. L'image juste au-dessus peut en témoigner. Le décor peut sembler rudimentaire dans son absence de détails et pourtant la séquence fait mouche par sa beauté, ses cadrages et son noir et blanc de qualité certaine.
    La bande son suit cette optique afin de bercer les oreilles. Pour les acteurs, on retrouvera le grand Marcello Mastroianni en réalisateur dépressif. Sa prestation est, sans surprise, de grande qualité, bien qu'il pourra parfois se montrer un poil agaçant. Les coquins que vous êtes savent aussi que le cinéma italien accorde une grande importance à la femme dans son essence, en la sublimant (on est rital ou on ne l'est pas). Je me permettrais de mentionner Anouk Aimée, Sandra Milo, Claudia Cardinale, Rossella Falk ou Barbara Steele. Leur grâce si puissante, leur charme si marquant, leurs yeux que l'on dévore. Excusez-moi, je m'égare !

    Donc, en poursuivant cette liste initiée fin mai, c'est avec un grand plaisir de me rendre compte que les chefs d'oeuvre s'accumulent à un rythme impressionnant. Bien sûr, 8 1/2 en fait partie et comment ! Fellini nous livre un film personnel stratosphérique de qualité décrivant tous les supplices et contrariétés que n'importe quel réalisateur a en lui : le fait d'avoir tout dit, de ne plus avoir de choses à raconter, de ne plus savoir quoi faire, ni écrire. Guido est de ceux-là et sa psychologie vacillante ne saura pas y faire face et le fera s'évader dans les fantasmes de son enfance torride, marquée par de nombreux événements ayant forgé sa personnalité si charismatique.
    Dès lors, 8 1/2 est un chef d'oeuvre additionnel à rajouter au palmarès d'un réalisateur culte qui aura marqué, pas seulement le cinéma de son pays, mais l'ensemble du Septième Art. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si un Oscar d'Honneur lui a été attribué pour l'ensemble de sa carrière par la prestigieuse Académie des Arts et des Sciences du Cinéma de Los Angeles. Un classique qui n'aura en aucun cas usurpé sa réputation, bien que son côté difficile d'accès soit là en raison d'un trait expérimental bien présent sous fond de tonalité fantastique. Tout simplement indispensable, pas seulement pour les cinéphiles mais pour n'importe quel réalisateur car tous sont ciblés. J'exigerais même que certains "tâcherons" du cinéma le visionne sous peu. Ca pourrait les remettre en question et leur ferait prendre conscience de leur médiocre travail. Je ne donnerai pas de nom mais ceux qui suivent mes chroniques sauront à qui je fais référence (sans rancune ;-) )

     http://cinemachoc.canalblog.com/archives/2018/08/11/36603069.html

    Note : 18/20

  10. =======================

  11. jeudi 24 septembre 2015

    8 1/2

    ...Asa Nisi Masa.

    "Ebranlé par le succès de La Dolce Vita et le scandale qu'il provoque dans certains milieux conservateurs, Fellini commence une analyse. Le docteur Ernst Bernhard l'initie aux théories de Carl Gustab Jung et lui fait comprendre que, contrairement au freudisme qui ne voit dans le symbole onirique qu'une traduction du refoulé, l'inconscient peut aussi renfermer un riche imaginaire poétique. La lecture de Jung lui permet d'explorer le symbolisme de l'inconscient collectif et de croire que les images irrationnelles peuvent être émotionnellement envoûtantes. Le cinéaste lui-même reconnaît que grâce à Jung, il fait de son cinéma "un point de rencontre entre science et magie, rationalité et imagination". Il commence à envisager un cinéma sans ligne de démarcation entre réel et imaginaire, un cinéma en immersion dans a psyché."

    (Federico Fellini - Angel Quintana - collection Grands cinéastes - Le Monde/Cahiers du cinéma, p.44)

    8_et_demi_affiche

    En proie à une sérieuse crise personnelle, un cinéaste se réfugie dans son imaginaire...

    Quand Potzina a proposé comme thème de son nouveau ciné-club, le cinéma et/ou le théâtre, je jubilais : les exemples ne manquent pas et très souvent ce sont de grands films doublé d'un attachement personnel qui nous les rend chers. J'aurais pu évoquer l'un de mes chouchous, Bergman (dont je rends compte à plusieurs reprises ici en ces lieux), ou un peu de Woody Allen, voire me revoir une énième fois cet immense fou rire qui met dans la joie et la bonne humeur, Singing in the rain (qui aborde d'ailleurs en chanson et en malice le passage du cinéma muet au parlant). Et puis je me suis replié sur un autre de mes cinéastes favoris, Federico Fellini avec son immense chef d'oeuvre 8 et demi (dont je n'avais encore jusqu'ici jamais dit un mot sur le blog)

    Dans l'Histoire du cinéma comme la carrière de son auteur (qui aborde véritablement un tournant à partir de 8 et demi face à l'apogée néo-réalistique qu'était La dolce Vita --autre chef d'oeuvre), 8 et demi est une oeuvre de cinéma qui révolutionne le rapport du spectateur aux images, de même qu'à la même époque Persona de Bergman, L'année dernière à Marienbad de Resnais, la trilogie existentialiste d'Antonioni (soit L'AvventuraLa notte et L'éclipse). Chacune de ces oeuvres ont en commun de repenser le récit non plus dans sa linéarité mais en partant soit de plusieurs points recomposés selon un fragile fil rouge (Marienbad), soit selon la psychée et l'intériorité de leurs personnages (d'où les symboles forts en ouverture et fermeture de Persona, sa mise en abîme du théâtre et du cinéma, sa fissure en plein milieu de film quand l'oeuvre qu'on voit décroche d'un coup et brûle sous le projecteur imaginaire qui la déploie; sans oublier Guido -- Marcello Mastroianni-- en alter-égo de Fellini qui va déverser littéralement ici son passé, ses souvenirs et ses visions dans la réalité pour se ressourcer et survivre à un film auquel il ne pourra survivre), soit dans la durée du temps (L'avventura étire son récit pour nous faire oublier la disparition du protagoniste principal, La notte se concentre essentiellement sur cette fameuse nuit où tout bascule, quand à L'eclipse, sa fin est comme en train de nous faire plonger dans un monde parallèle en mettant en exergue des lieux connus des personnages principaux, mais sans eux, comme si on filmait à un autre moment, un autre temps). Et ne parlons pas de La Jetée qui en 30 mn d'images et photos fixes et l'animation d'un seul plan arrive à délivrer un hommage incroyable au cinéma (et Hitchcock).

    Un autre point commun de tous ces films d'ailleurs c'est qu'on finit littéralement la séance abasourdis généralement la première fois qu'on en voit un, pour pousser un "Wouah, what the fuck I've seen ?" :)

     

    8 et demi1


    On peut penser que tous ces films qui se veulent autant d'expériences cinématographiques peuvent rebuter d'emblée sous le prestige qui les orne, il n'en est rien. A tous ceux qui auraient peur de se lancer, je ne pourrais fournir que ce judicieux conseil : laissez vous porter par les images, les sons, le sens caché qui les enrobe tous. On aura tout notre temps après pour jaser, gloser, philosopher, décortiquer, que ne sais-je (et il y a de quoi faire). Et 8 et demi est ici l'exemple parfait du film où il faut accepter le voyage (mais c'est une constante de Fellini aussi cela dit).

    De quoi parle 8 et demi ? Et d'abord c'est quoi ce titre étrange qui ne représente même pas un chiffre complet ? Peu après être sorti de La dolce vita, Fellini traverse une profonde crise existentielle et se remet tellement en cause qu'il envisage d'écrire une lettre à son producteur afin d'arrêter le cinéma. Il en est là de ses tergiversations, déprimé et morose, qu'il est invité à participer à une petite fête avec des membres de l'équipe. L'idée de son prochain film, floue mais alors embryonnaire va lui traverser l'esprit : un cinéaste (comme lui peut l'être) qui s'interroge sur un film qu'il n'arrive pas à faire, pressé de toutes parts, autant par des acteurs et techniciens que son épouse, voire sa maîtresse, les souvenirs, rêves et pensées devenant autant de visions à même d'émerveiller ou d'apporter le réconfort que la réalité ne peut donner.

    Ce cinéaste alter-égo, Fellini n'a pas à chercher bien loin, il le trouve en Marcello Mastroianni (*). Un Mastroianni qui va alors calquer son jeu et comportement sur celui de Fellini. Le plus surprenant contrairement à ce qu'on pourrait croire, est que 8 et demi n'est pas un film sur le cinéma comme on peut le voir ou le penser souvent (qu'on repense à La nuit américaine --que j'aime beaucoup d'ailleurs, hop, un lien featuring The movie freak-- ou ça tourne à Manhattan) dans le sens où l'on assisterait à un tournage de l'intérieur et en direct avec les aléas de joies et peines que ça comporte.


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    Non, ici, le cinéma se situe en amont, dans le processus créatif et ses choix qui détermineront l'oeuvre à venir. Ce sont les photos d'actrices et d'acteurs qui jouxtent le lit de GuidoMarcelloFellini et son bureau, ces décors de maquettes SF sur papier entrevues dans la chambre de son chef décorateur, puis, plus tard dans des reproductions 3D à l'air libre, près du gigantesque échaffaudage. Ou bien cette séance de rush qui se conclut sur une dispute irréversible entre Luisa, sa femme (Anouk Aimée, sublime) et où Guido fait dire à une actrice tout ce qu'il reproche et espère en même temps à son couple sans avoir le courage de le dire dans la réalité. Séance où Fellini avec malice alterne un gag où Guido imagine un court instant un critique redondant se faire pendre en direct, mais ce n'est malheureusement qu'une pensée furtive... Et complice de tous ce que les réalisateurs du monde entiers doivent parfois subir vis à vis des critiques et journalistes.

    D'ailleurs Fellini n'est pas fou, le personnage du critique-écrivain convoqué en amont pour s'occuper du scénario du film à venir qui tout le long, adresera critiques et reproches constants au cinéaste n'est qu'une manière de placer un garde-fou entre ce film et les autres films du maestro. Car Fellini sait qu'il est attendu au tournant, or quoi de plus fascinant qu'un film qui désamorce consciemment toutes les critiques qu'on peut lui faire en les mettant dans la bouche d'un personnage pour mieux les contourner et dire d'une certaine manière au public d'accepter ce qu'il voit. Oui le cinéma et les êtres sont faillibles. Oui, on essaye de faire des oeuvres qui portent en elles leur part d'humanité, mais parfois aussi on échoue. De nos jours on appliquerait tous plein de procédés métas qui trouvent leurs sources ici dans ces oeuvres des 60's (on pense à un personnage qui jouerait avec le spectateur mais qui ne reprendrait que l'apostrophage de celui-ci comme le faisait déjà Bebel, pince-sans-rire, dans A bout de souffle) mais à ce stade, en 1963, le tout était fait sans cynisme, avec la volonté de proposer quelque chose qui ne soit pas qu'amusement (et burger de pellicules autoréférencées actuelles) mais qui interroge, fasse réfléchir, remette en cause même sa propre existence. C'est le pouvoir du cinéma, de ce film, de plein de films.

     

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    Et en marge du cinéma et des personnages à créer, il y a les rêves et souvenirs qui peuvent aussi réchauffer ou donner à s'interroger, voire recréer des personnages issus de ses rêves. C'est la séquence de la formule magique d'Asa Nisi Masa qui fait remonter à l'enfance, en un temps où les familles nombreuses sont bordées dans d'immenses lits et veillées à la bougie. A contrario ce film étouffant qui n'avance pas crée le cauchemar étrange de l'embouteillage du début.

    Et avec ce film, Fellini se penche sur les multiples personnages féminins qui émaillaient déjà sa filmographie mais se multiplieront encore plus par la suite jusqu'à l'hommage ambigü, drôle et grinçant de La cité des femmes où femmes comme hommes en prennent chacun plein la tronche. Ici, chaque femme du film renvoie à une constituante de l'image féminine vue du côté de Guido (Fellini essaiera ensuite dans Juliette des esprits d'aborder le point de vue féminin), mâle basique des 60's. D'où la séquence drôle et grotesque du harem (et totalement absurde) qui les voient toutes réunies à travers le temps et les souvenirs dans un lieu n'existant qu'au fond des pensées du cinéaste, bien moins machiste qu'on veut le croire (les personnages féminins se rebellent d'ailleurs ouvertement contre leur créateur) car ici elles ne sont que concepts et non réalité, même si elles tentent de reprendre le dessus sur la conscience torturée qui les garde dans la cage dorée mais inoffensive du souvenir.

    On ne les citera pas forcément toutes mais une poignée qu'on retrouvera de films en films sous d'autres visages et d'autres noms. Il y a La saraghina, archétype même de la pulsion sexuelle et libidinale primaire avec ses hanches, ses fesses et ses seins énormes (voir aussi dans Amarcord, la buraliste imposante ou dans La cité des femmes, la prostituée qui initiera le jeune adolescent à la découverte du sexe). Il y a la maternelle tendre et sensuelle (Sandra Milo qui joue ici Carla, sa maîtresse), la répressive (l'épouse délaissée qu'on ne peut qu'accepter après avoir vu les frasques de son mari cinéaste. D'ailleurs même s'il reste tendre avec Guido, on voit que Fellini, sans juger ni être complaisant, se range probablement du côté de l'épouse trompée), celle qui est inaccessible et presque trop parfaite (Claudia Cardinale, vision de rêve incroyable qui ne prendra corps que pour livrer une désillusion au réalisateur, comme si le rêve ne pouvait qu'être illusion constamment terrassée par la réalité), l'artiste et intellectuelle dans son monde (géniale Barbara Steele qui traverse le film comme une diva gothique échouée dans un autre monde comme Nico dans La dolce vita d'une certaine manière), la bonne copine confidente et neutre (Rossella) et j'en passe, j'en passe...

     

    Le film est si riche qu'on pourrait le décortiquer sans fin... Au fait et ce titre alors ? Eh bien à ce stade de sa carrière, Fellini avait déjà livré 7 long-métrages et une co-réalisation (Les feux du music-hall en 1950 avec Alberto Lattuada), donc un demi film. C'est donc son huitième film... et demi. Le fait de livrer un chiffre en lui-même plutôt qu'un titre a fonction d'interpeller, d'interroger et de pointer bien sûr le doigt sur la carrière cinématographique qui ici, prend un tournant à 180°. Il y a un avant et un après 8 et demi dans la filmographie du cinéaste. Si auparavant, il décrivait un monde réaliste encore e proie à la misère de l'après-guerre comme une bonne partie de ces confrères italiens de cette époque, à partir d'ici il s'élève dans des dimensions réflexives et oniriques dont il ne ressortira plus, pour le plus grand bonheur de ceux qui aiment ses oeuvres.

     

     

     

     

    (*) Suite à mes visionnages Fellinien, je découvrais Mastroianni dans la foulée il y a quelques années. Coup de foudre immédiat qui le fit devenir un de mes acteurs préférés, si ce n'est mon acteur préféré. Ce n'est pas pour rien qu'il est un peu l'avatar de ce blog.

  12. http://dvdtator.canalblog.com/archives/2015/09/24/32668609.html

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  14. Critique publiée par le 

    Bon allez courage !!

    Difficile d'attaquer de face une oeuvre aussi intense, aussi dense et impressionnante que ce huitième film et demi du grand Federico.

    Tout d'abord, je dois avouer qu'il y a dèja quelques années que je n'ai pas revu ce film. Mais il est aussi vrai que je l'ai regardé à de très nombreuses reprises durant mes jeunes années, pour essayer de décrypter ces images en noir et blanc, d'une beauté inouïe et d'un hermétisme excitant ma curiosité . De démêler le fil d'un scénario, dont je compris bien plus tard, qu'il n'était qu'un alibi alambiqué pour laisser libre cours à la vision féerique et poétique du cinéaste de Rimini.

    Effectivement on comprend vite que ce Guido Anselmi ( campé par l'un des plus grands acteurs de l'histoire du cinéma : Le sublime Marcello Mastroianni !) n'est autre que Fellini lui-même et qu'on est parti pour 2h20 de mise en abyme.
    Cette mise en abyme autour du réalisateur aurait pu rapidement s'avérer nombriliste et totalement stérile, mais le génie du maître en a décidé autrement.
    Ces thèmes que le maître Italien brasse dans le film, qui semblent si personnels ( et qui le sont, d'ailleurs.) ,sont aussi fortement universels; et touchent dans leurs différences et leur diversité, chacun de nous.

    Réflexion sur l'Art, sur le processus (complexe et aléatoire) de création, sur le tarissement de la veine artistique. Sur la dépression. Sur l'amitié et les rapports humains. Sur la famille. Sur le sexe.
    Un film mêlant divinement réel et imaginaire. Nous laissant flotter, vaporeux, ne sachant où poser le pied. Nous perdant, au fur et à mesure, dans le labyrinthe cérébral de Guido. Entremêlant les souvenirs émouvants de ses parents, ses 5 à 7 avec sa pulpeuse maîtresse et ses fantasmes sexuels débridés où ils dressent à coups de fouet les nombreuses femmes qui ont traversées sa vie.

    Un film qui de toutes façons ne laisse pas de marbre. On l'adore. On le déteste. Mais on réagit....

    Et puis ce final !!
    Ce final où le réalisateur met en scène sa propre vie (Au son du thème génial de Nino Rota!!)..Où chaque amis, parents, femmes, maîtresses, collègues, connaissances prennent vie, s'articulent comme des pantins sur les ordres du réalisateur; enfin maître de son destin et de ses désirs. Prouvant ainsi, que la vie, notre vie, n'est qu'un grand cirque, une grande arène où s'ébattent les gens que nous voulons bien y mettre.

    Et Fellini nous démontrant, in fine, qu'il nous faudrait être les réalisateurs tout-puissants de nos propres vies.
    Et faire, ce qu'a fait Fellini tout au long de sa carrière, un grand, un immense film de sa propre vie.

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  16. Un film sur le cinéma

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    Sorti en 1963, 8 1/2 est un film réalisé par Federico Fellini. Le film doit son titre étrange au fait qu'il soit le huitième film de long-métrage de Fellini, et qu'entre temps, le réalisateur avait également signé une moitié de film (deux sketches dans deux films collectifs, dont Boccace 70). Soit 8 films et une moitié de film en tout ! Le film est interprété par Marcello Mastroianni, Anouk Aimée, Sandra Milo, Claudia Cardinale, Barbara Steele, Jean Rougeul et Rossella Falk. Tourné en noir & blanc, c'est une sorte de métaphore sur le cinéma et la création artistique. Un film très personnel.

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    Guido Anselmi (Marcello Mastroianni) est un cinéaste dépressif. Fuyant le monde du cinéma, il se réfugie dans un univers très personnel, rempli et de souvenirs, et de fantasmes non accomplis. Tout se mélange, souvenir familiaux, anciennes conquêtes, envies subites et fantasmes...réfugié dans une ancienne station thermale, il reçoit plusieurs visites de sa femme Louisa (Anouk Aimée), de sa maîtresse Carla (Sandra Milo), de ses collaborateurs, afin qu'il se remette au boulot et finisse enfin le film sur lequel il doit travailler, et qui urge...

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    Très personnel, 8 1/2 (ou Huit Et Demi) est un des meilleurs films de Fellini, même si, je l'avoue, je suis nettement plus fan de la période 1969-1974 que du reste de sa filmographie (c'est la période pendant laquelle il sortira Fellini SatyriconLes ClownsFellini Roma et Amarcord, soit ses chef d'oeuvres). Assez complexe car navigant sans cesse entre rêveries et réalité, le film recevra un grand nombre de récompenses : Ruban d'argent en 1963, NYFCC Award la même année, Grand Prix au festival de Moscou aussi en 1963, Oscar du meilleur film étranger en 1964, et Bodil du meilleur film européen en 1964 aussi.  Le film, qui était appelé Le Beau Désordre durant son tournage, est magistralement interprété.

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    Alors qu'un remake hollywoodien serait en cours de chantier (Nicold Kidman, Daniel Day-Lewis, Marion Cotillard, Sophia Loren, Penelope Cruz et Kate Hudson l'interpréteraient), il faut absolument voir et revoir ce film mythique, bercé par une inoubliable musique de Nino Rota. 138 minutes de bonheur pour amoureux du cinéma !

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  18. Maestria

    Le 18 juin 2014

    Ce non-récit des fantasmes d’un cinéaste est un monument du cinéma et la quintessence de l’art de Fellini. Cannes Classics 2014 en a présenté une version restaurée.

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  20. Les meilleurs films de notre vie : '8 ½' le chef d'oeuvre aux multiples interprétations de Fellini

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    "Le labyrinthe tortueux, changeant, fluide des souvenirs, des rêves, des sensations, un enchevêtrement inextricable de quotidien, de mémoire, d'imagination, de sentiments, de faits qui ont eu lieu il y a longtemps et qui vivent avec ceux qui ont lieu à présent, qui se confondent entre nostalgie et pressentiment, le temps qui s'arrête, magmatique, et tu ne sais plus qui tu es, ou qui tu étais, et où va ta vie, qui semble n'être qu'un long demi-sommeil sans aucun sens." (Federico Fellini)

    8 1/2 : derrière un titre mystérieux se cache le film dans lequel Fellini a mis à nu avec une sincérité criante sa propre crise de la quarantaine en tant qu'homme et artiste. Il s'agit d'un autoportrait à la fois fidèle et imaginaire, effronté et ironique, qui pénètre dans la dimension onirique, visionnaire et réelle du "temps intérieur".

    Pas mal d’ouvrages sur le cinéma en tous genres fleurissent à l’occasion du festival de cannes qui commence demain soir, on va donc essayer de vous en parler de quelques-uns dans les jours à venir.

    On commence par un livre qui met en avant un chef d’œuvre d’un grand cinéaste qui a été palmé en 1960 pour la Dolce Vitta, à savoir le chef d’œuvre Huit et demi  de Fédérico Fellini qui inspira des générations de réalisateurs:

    La collection Les meilleurs films de notre vie   des éditions Gremese,  qui a été inaugurée l’année dernière avec, entre autres, 'L'Atalante' et 'Madame de...'  s’est récemment s'enrichie d'un ouvrage sur ce film mythique de Federico Fellini 

     Ce livret analyse est l’œuvre de Roberto Chiesi, critique de cinéma et responsable du Centre d'études de la Cinémathèque de Bologne.

    Huit et demi,  qui est un unanimement considéré comme un des plus beaux de l'histoire du cinéma,  est aussi avant tout une  magnifique réflexion sur les affres de la création.

    C'estl’histoire de l’histoire d’un film (qui ne se fera peut-être jamais)qu'on suit à travers les états d’âme, les rêves et les obsessions de son metteur en scène  Guido est évidemment une œuvre qui peut être source de quantités d’analyse et d' interprétations en tous genres.

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     Une analyse poussée de '8 ½'. montre à quel point Fellini est le cinéaste de l’autobiographie vécue ou rêvée. Il poursuit une exploration de son univers intérieur ou de ses souvenirs, et en particulier de ses souvenirs d’enfance dans ce si dense Huit et demi. 

    L’image de Mastroianni avec chapeau et lunettes est devenue iconique. Le thème final de Nino Rota est aujourd’hui l’une des musiques des plus célèbres de toute l’histoire du cinéma.

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    "Depuis j'ai revu 8 1/2 une dizaine de fois. Mais à chaque fois, j'ai pu faire l'experience d'un univers qui  était devenu d'une part un lieu familier, déjà visité, où les possuières des souvenirs personnels et imaginaires avaient pu se déposer, et d'autre part un phénomène toujours nouveau-à la découverte d'itinéraires et de secrets inédits et inattendus-qui en fonction du lieu et du moment, révelait de nouvelles nuances" (Roberto Chiesi dans le prologue de son livre).

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  21. Maurice Elia

    Le réveil de notre propre éthique secrète Un degré de stagnation et de confusion E n juillet 1963, le Festival de Moscou en était à sa troisième édition et rassemblait, peut-être pour la première fois, un nombre considérable de personnalités, de cinéastes et de vedettes. Les films provenaient d'une soixantaine de pays. Quelques dissensions idéologiques avaient cependant entraîné le retrait in extremis des Chinois, et pour les mêmes raisons sans doute, l'Albanie et la Corée étaient absentes de l'événement. Cependant, la qualité des films présentés n'a pas répondu à l'attente de tous. Sans contredit, 81/2 se détachait du lot et c'est en toute justice qu'il lui fut accordé le Grand Prix (« pour le remarquable travail de réalisation qui reflète la lutte intérieure de l'artiste à la recherche de la vérité »), après une discussion acharnée d'ailleurs, car le jury était très divisé. On crut un instant que le Grand Prix ne serait pas décerné, puis l'unanimité finit par se faire devant l'évidence. Mais dans les milieux officiels soviétiques, il était clair que le film de Federico Fellini ne répondait que d'assez loin tant à la devise du festival qu'aux besoins du grand public. « La lutte intérieure de l'artiste à la recherche de la vérité » ? Les jurés des festivals ont de ces formules ! Le chef-d'oeuvre de Fellini nous apparaît plutôt, du moins aujourd'hui, comme un essai sur la stérilité artistique, un appel au secours vers une période heureuse, vers une enfance idéalisée et magnifiée du cinéma. Dans 81/2, Fellini fait entre autres le procès des intellectuels de gauche dont le jargon lui semble totalement étranger (Guido fait pendre en imagination le critique Daumier qui le harcèle de ses remarques), des artistes qui veulent dire quelque chose mais finissent par se taire (la femme de Guido le traite ironiquement de « prophète qui veut parler à la foule » alors qu'il est incapable de dire la vérité). Et il le fait avec une exubérance, une joie de vivre et de créer, une confiance qui éclatent à chaque instant de son film magique. Le baroque des images, des décors, des costumes, l'absolue beauté de la photographie, le tourbillon des accents musicaux de Nino Rota donnent à 81/2 un souffle d'émotion qui a rarement été atteint depuis. Devant le film qu'il doit finir par faire, le héros, finalement un homme quelconque, se sent victime de lui-même. Il a atteint un degré de stagnation totale, un degré de confusion qui l'anéantit. Il compatit bruyamment aux tortures qu'il s'inflige, se souvenant de son innocence perdue en revisitant en pensée l'époque où les enfants, tout nus, foulaient le raisin dans une ambiance qui sentait bon les draps frais, l'eau bue à la cruche, à l'ombre de la maison natale. Aujourd'hui, il se présente à nous avec une sorte de gêne qui lui gâche constamment le plaisir de tourner, de créer, de donner. À ce propos, la place donnée au rêve dans 81/2 (et cela rejoint la plupart des autres films de Fellini) est très révélateur : le cinéaste qui s'est taillé une réputation d'intellectuel nous avoue brusquement que c'est une imposture, car ce qui lui plairait vraiment, c'est le monde imaginaire, celui même des romans-photos qu'il avait l'habitude de condamner abusivement. Soudain, le voilà qui s'accuse lui-même d'exhibitionnisme. Ces aveux impudiques éveillent en nous une nostalgie où le péché n'existerait pas, où l'épouse et la maîtresse seraient assises, amies, à la même table, où les gens voleraient dans les airs. À la vision de 81/2, on se surprend, même aujourd'hui, à remarquer que certaines cordes ne vibrent plus en nous, que nous sommes peut-être trop vite devenus trop adultes, trop rationnels. Car notre éthique secrète, notre poétique profonde sont, semblet-il, toujours réveillées par le foisonnement des harmonies et des résonances felliniennes.


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ROBERT SIODMAK (1904 - 1973)