THE WIZARD OF OZ (Le Magicien d’Oz) – Victor Fleming (1939)
Célèbre pour ses chansons, The Wizard of Oz (Le Magicien d’Oz) le fut aussi en son temps pour son budget inhabituel et son tournage mouvementé. Alors que les réalisateurs se succèdent aux commandes de cette superproduction de la M.G.M., les prises de vues sont en effet retardées par des accidents : après l’intoxication à l’aluminium de l’Homme de fer, c’est la sorcière qui prend feu, puis sa doublure. Et même le chien « jouant » Toto sera blessé à la patte… Mais au-delà de l’anecdote, c’est bien sûr le film lui-même qui fascine le public – en particulier les Américains – depuis plus de soixante-dix ans. Son esthétique y est pour beaucoup : explorant les possibilités du Technicolor naissant, le chef opérateur Harold Rosson et le directeur artistique Cedric Gibbons ont créé un univers aux tons saturés et aux formes étonnantes, qui font du film un feu d’artifice visuel. La bande musicale, qui compte plusieurs chansons devenues très populaires, n’est pas en reste: elle a d’ailleurs valu au film deux Oscars – une troisième statuette étant attribuée à Judy Garland pour célébrer son statut de « révélation de l’année ». Car la jeune actrice révèle dans The Wizard of Oz un potentiel qui, comme on le sait, ne décevra pas ses fans de la première heure… [Comédie Musicale – Eric Quéméré – n°18]
La légende veut que deux billions de personnes aient vu The Wizard of Oz et que le film ait été l’œuvre cinématographique ayant eu le plus de spectateurs au cours de ses représentations en salles et de ses diffusions à la télévision. Plus d’un demi-siècle après sa réalisation, le film demeure un joyau fascinant, l’un des plus beaux exemples de l’«usine à rêves» hollywoodienne. Le tournage du film fut pourtant particulièrement difficile. Initialement, c’était un projet de Samuel Goldwyn qui souhaitait avoir Eddie Cantor en vedette. Louis B. Mayer réussit à racheter à Goldwyn les droits d’adaptation du roman de L. Frank Baum en utilisant l’habileté de Frank Orsatti, son ancien bootlegger. [La comédie musicale – Patrick Brion – Edition de la La Martinière (1993)]
Mervyn LeRoy, que Mayer avait arraché à la Warner Bros., espérant trouver en lui un nouveau Thalberg ou un nouveau Selznick, fut chargé de produire le film et Mayer lui confia comme collaborateur direct Arthur Freed, en qui il plaçait d’énormes espoirs mais qui était encore incapable d’assurer seul la production d’un film aussi ambitieux. Le succès remporté par The Wizard of Oz a incité, par la suite, la plupart de ceux qui y travaillèrent à le revendiquer à part entière. Arthur Freed avait besoin d’une réussite à mettre à son actif. Il tint donc à tirer tout le bénéfice possible du film. Mervyn LeRoy affirme de son côté : « M. Mayer a acheté le livre pour moi. Je souhaitais faire un film à partir du Magicien d’Oz depuis mon enfance. J’en ai assez d’entendre parler d’Arthur Freed et du Magicien d’Oz. Le nom d’Arthur Freed n’est même pas au générique. Le mien, si. M. Mayer m’a demandé de prendre Arthur comme assistant et il m’a aidé en ce qui concerne la musique. Je n’ai jamais rien revendiqué qui ne m’appartienne réellement. Mais c’est moi qui ai produit le film. »
Le choix des acteurs a été un premier casse-tête. Même si le nom de Judy Garland est prononcé parmi les premiers, les financiers de la Metro-Goldwyn-Mayer semblent préférer Shirley Temple, alors à la Fox, ou Deanna Durbin, sous contrat à l’Universal. L’une et l’autre sont plus connues que Judy Garland et la présence de l’une ou de l’autre rassurerait Nicholas Schenck, le patron financier de la M.G.M., déjà inquiet par le devis du film. Mais Darryl F. Zanuck ne veut pas se séparer de Shirley Temple, ni l’Universal de Deanna Durbine On parle aussi de Bonita Granville, sous contrat à la Warner, avant que Judy Garland ne soit définitivement choisie. [La comédie musicale – Patrick Brion – Edition de la La Martinière (1993)]
Le personnage du magicien est lui aussi l’objet de multiples hypothèses. Sont ainsi envisagés pour le rôle Ed Wynn, W. C. Fields, trop accaparé par son prochain projet pour l’Universal, Hugh Herbert, Victor Moore, Robert Benchley, Charles Winninger… Wallace Beery souhaite incarner le magicien mais les dirigeants de la Metro, qui redoutent certains de ses écarts, lui préfèrent Frank Morgan. Gale Sondergaard et Edna May Oliver sont évoquées pour le rôle de la vilaine sorcière, la première subit même les essais de rigueur, mais c’est Margaret Hamilton qui est finalement choisie.
Demeure le problème du metteur en scène. On parle tout d’abord de Norman Taurog qui, contrairement à ces rumeurs, a parfois affirmé n’avoir jamais été en lice – puis de Richard Thorpe qui commence à tourner le 12 octobre 1938. Mais le travail de l’excellent cinéaste de Night Must Fall (La Force des ténèbres) et de Tarzan escapes (Tarzan s’évade) ne semble pas donner satisfaction. On reproche à Thorpe son manque de chaleur. Un drame se produit à ce moment car Buddy Ebsen, qui avait été le partenaire de Judy Garland dans Broadway Melody of 1938, tombe gravement malade, intoxiqué par les particules de poudre d’aluminium de son maquillage (il joue le rôle de l’homme en fer-blanc). Buddy Ebsen est alors placé sous une tente à oxygène et il est décidé de le remplacer. De même que Richard Thorpe. Jack Haley succède alors à Buddy Ebsen et la M.G.M. décide de confier la réalisation du film à George Cukor, l’un des plus brillants cinéastes de la Metro. Cukor ne travaillera que quelques jours – trois – sur le film, se contentant de faire de nouveaux essais de costumes, de coiffure et de maquillage.
L’apparence de Dorothy que joue Judy Garland est ainsi modifiée et Cukor quitte The Wizard of Oz pour Gone with the Wind (Autant en emporte le vent), le prestigieux projet de David O. Selznick. Victor Fleming lui succède. Fleming a dirigé certains des plus grands acteurs de la M.G.M., de Clark Cable à Jean Harlow. Il sait aussi tirer le meilleur d’eux-mêmes des enfants et l’a prouvé avec Treasure Island (L’Ile au trésor, 1934) et Captains Courageous (Capitaines courageux). Il est donc parfaitement à même de pouvoir travailler avec Judy Garland. Fleming assurera durant quatre mois la mise en scène du film avant de remplacer George Cukor sur Gone with the Wind. On peut d’ailleurs remarquer que l’on doit au même Victor Fleming deux des plus exceptionnels films de l’année 1939 et même de la production hollywoodienne, The Wizard of Oz et Gone with the Wind, deux œuvres dont les tournages ont été particulièrement complexes.
A la mi-février 1939, Fleming quitte donc The Wizard of Oz, laissant la place à King Vidor qui préférait – paraît-il – terminer le film, presque achevé, plutôt que de risquer d’être obligé de mettre en scène Gone with the Wind. King Vidor assurera la réalisation des séquences en noir et blanc, les retakes de « If I only have a Brain » et la finition d' »Over the Rainbow », déjà enregistré par Judy Garland. Il tournera pendant dix jours. Il est par ailleurs possible que Jack Conway et W. S. Van Dyke, deux des cinéastes maison de la M.G.M., aient filmé quelques plans à un moment où Victor Fleming aurait été malade.
Aucun plan tourné par Thorpe ne figure dans le montage définitif et seul Victor Fleming est crédité comme metteur en scène, King Vidor demeurant dans l’ombre. Parallèlement à cette succession de metteurs en scène, une dizaine de scénaristes ont travaillé à l’élaboration du découpage, le générique ne portant les noms que de trois d’entre eux. Il semble que l’on doive à Herman J. Mankiewicz l’idée de jouer sur une rupture de ton entre les premières scènes et la fin, en noir et blanc, et le reste – la partie onirique – réalisé en couleurs. [La comédie musicale – Patrick Brion – Edition de la La Martinière (1993)]
La chorégraphie du film est créditée à Bobby Connolly mais Albertina Rasch a remplacé ce dernier durant quelques jours de maladie et Busby Berkeley a collaboré à la mise au point du numéro « If I only have a Brain ». Le tournage fut l’occasion de divers incidents. Margaret Hamilton fut brûlée et sa doublure Betty Danko gravement accidentée. Le fait que Judy Garland soit obligée – en plein tournage – de suivre les cours de son professeur Rose Carter, posait également des problèmes et retardait la réalisation des plans, Jack Haley, Bert Lahr et Ray Bolger étant par ailleurs contraints de conserver toute la journée leur costume et leur maquillage. Acteurs et techniciens devaient aussi supporter la chaleur causée par l’éclairage du studio, particulièrement élevé en raison du tournage en couleurs.
En dehors de ces divers ennuis, l’obligation de réunir pour jouer les Munchkins plusieurs dizaines de nains entraîna d’innombrables surprises. La question de leur recrutement est d’ailleurs l’objet de deux versions différentes. Dans l’une, c’est Leo Singer qui s’en chargea ; dans l’autre, c’est le Major Doyle, qui détestait la manière inhumaine dont Singer traitait les nains et assura la présence de plus d’une centaine d’entre eux, exigeant que Singer ne s’en occupe pas du tout.
Venus de partout, les nains étaient logés au Culver City Hotel où ils causèrent de multiples scandales. Certains étaient des souteneurs, de très dangereux personnages, toujours prêts à jouer du couteau. Souvent ivres, ils agressèrent les starlettes de la M.G.M. – se glissant sous leurs jupes ! – insultaient ceux qui leur parlaient et se livrèrent à de véritables orgies. Le fait que la majorité étaient des étrangers empêcha par ailleurs Fleming d’enregistrer comme il le souhaitait leurs chansons et l’obligea à les faire doubler. La réunion de 124 nains et de six enfants pour jouer les Munchkins fut un élément de curiosité – une superbe photographie publiée dans « The Munchkin remember » montre plusieurs dizaines de nains en costumes civils traversant ensemble une rue en se rendant au studio pour le tournage du film – et une source de problèmes divers. [La comédie musicale – Patrick Brion – Edition de la La Martinière (1993)]
Aucun de ceux-ci n’a pourtant empêché la production du film telle que la souhaitaient Louis B. Mayer et Mervyn LeRoy. A un moment où la tension mondiale devenait de plus en plus forte et où l’idée d’un conflit international était possible, The Wizard of Oz est l’évocation d’une province américaine idyllique où il suffit de se réveiller pour être débarrassé des drames et des angoisses. « La maison ! Et c’est ma chambre… et vous êtes tous autour de moi ! Et je n’aurais jamais à partir parce que je vous aime tous. Et… Oh, Tante Em, il n’y a aucun endroit comparable à chez soi. » Ces derniers mots du film, ce cri du cœur de Dorothy découvrant qu’elle est toujours chez elle, était le credo de Louis B. Mayer qui célébrait ainsi tout à la fois l’Amérique provinciale et la famille, deux des valeurs auxquelles il était le plus attaché.
Conte pour enfants, peuplé comme il se doit de personnages inquiétants – la sorcière est aussi cauchemardesque que la tête gigantesque du magicien d’Oz – le film n’est pas sans lien avec les théories psychanalytiques qui allaient tant intéresser les scénaristes hollywoodiens. L’épouvantail, l ‘homme en fer-blanc, le lion peureux, la vilaine sorcière et le magicien d’Oz lui-même ne sont, en effet, que la vision onirique et déformée de personnages côtoyés par la jeune Dorothy au cours de sa vie quotidienne au Kansas. La trombe, dont la violence provoque accidentellement le rêve de Dorothy – et que A. Arnold Gillespie avait créé au moyen d’un bas – sera à l’origine de la catharsis finale.
La vision du palais d’émeraude, tout en vert, la découverte par Dorothy d’un monde extraordinaire fait de routes jaunes, de pommes plus rouges que nature, d’arbres qui parlent, et de sorcière au visage verdâtre, sans oublier les singes ailés et la création fantasmagorique du magicien lui-même composent un univers fascinant. Célébré par les romans de L. Frank Baum, cet univers a trouvé une profonde identification avec l’Amérique non seulement de 1939 mais également d’aujourd’hui. Alors que la plupart des autres films de cette époque sont relégués à des heures de faible audience, The Wizard of Oz est toujours diffusé à la télévision américaine avec un considérable succès, les objets, costumes et souvenirs du film étant d’ailleurs l’occasion de spéculations de collectionneurs.
Les fameuses chaussures de Dorothy – du moins l’une des paires ! – sont exposées au Smithsonian, le National Museum of American History, à côté d’une des versions du scénario, celle de Noel Langley, datée du 4 mai 1938. Ce qui n’aurait pu être que la réponse de la Metro-Goldwyn-Mayer aux films produits par la 20th Century-Fox avec Shirley Temple est devenu, par la magie du studio, une œuvre exceptionnelle. Il suffit de comparer The Wizard of Oz à The Blue Bird (L’Oiseau bleu), réalisé en 1940 – donc quelques mois plus tard – par Walter Lang avec Shirley Temple d’après Maurice Maeterlinck, pour en être persuadé.
La perfection, l’originalité et le goût des techniciens et créateurs de la M.G.M. sont à l’origine de la qualité du film. Ceux qui avaient pensé que Shirley Temple était mieux destinée que Judy Garland pour jouer le rôle de Dorothy n’ont pu qu’être convaincus de leur erreur. Curieusement, la chanson « Over the Rainbow », l’une des plus belles du film et une de celles que la chanteuse interprètera sur scène jusqu’à sa mort devant un public toujours ému, a failli être coupée et ne fut rétablie qu’au dernier moment dans le montage définitif. Le jour de la mort de Judy Garland, la presse américaine indiqua qu’une tempête d’une violence inhabituelle s’était abattue sur le Kansas. [La comédie musicale – Patrick Brion – Edition de la La Martinière (1993)]
L’HISTOIRE
La jeune Dorothy déteste Mrs. Almira Gulch qui veut la forcer à se défaire de son petit chien Toto. Mrs. Gulch, qui a un ordre du shérif, emmène Toto avec elle. Toto s’échappe et rejoint Dorothy qui décide de se sauver avec lui. Dorothy croise le professeur Marvel, un charlatan ambulant. Le vent se lève. Une tornade approche. Dorothy, qui est rentrée chez elle, est assommée par une fenêtre, poussée par la tempête. Elle imagine qu’elle se trouve dans un monde en couleurs, Munchkinland. Dorothy rencontre Glinda qui lui révèle qu’elle a causé la mort de la vilaine sorcière de l’Est, écrasée par la maison de Dorothy. Les Munchkins considèrent dès lors Dorothy comme une héroïne mais Dorothy veut rentrer chez elle. Seul, le magicien d’Oz peut l’aider.
Elle doit le retrouver et suivre pour cela la route payée de briques jaunes, Elle part donc pour la Cité d’émeraude et, en chemin, rencontre successivement l’épouvantail, l’homme en fer-blanc et le lion peureux. Ceux-ci accompagnent Dorothy, espérant que le magicien d’Oz sera capable d’exaucer leurs vœux, de donner une cervelle à l’épouvantail, un cœur à l’homme en fer-blanc et du courage au lion peureux. Ils arrivent finalement tous en vue de la Cité d’émeraude mais la vilaine sorcière de l’Ouest est décidée à les en empêcher. Glinda leur évite d’être empoisonnés par des fleurs maléfiques et les quatre amis atteignent enfin le château du magicien. Mais Dorothy et Toto sont enlevés par les singes ailés de la vilaine sorcière. L’épouvantail, l’homme en fer-blanc et le lion peureux se portent au secours de Dorothy qui finit par disparaître, victime de l’eau qu’elle a reçue. Le magicien se révèle n’être qu’un charlatan mais, grâce à lui, chacun trouve une partie de ce qu’il cherchait. Dorothy peut repartir chez elle, comme elle le souhaite. C’est alors que Dorothy se réveille. Ce n’était qu’un rêve. Elle est bien au Kansas, chez elle, auprès des siens et de ceux qu’elle connaît.
PROGRAMME MUSICAL
JUDY GARLAND
Judy Garland à l’instar d’un James Dean ou d’une Marilyn Monroe, est entrée trop tôt dans la légende du cinéma. Personnalité fragile et dépressive, elle n a pas pu surmonter les profondes crises qui entraînèrent sa fin prématurée. Par sa carrière exceptionnelle commencée dès sa plus tendre enfance aussi bien que par sa mort précoce, à quarante-sept ans à peine, Judy Garland est devenue un mythe du monde du spectacle. Perfectionniste et tourmentée, elle fut la victime de son propre succès, payant de sa santé et, pour finir, de sa vie l’adulation qu’elle suscita. Sans la moindre pitié. elle fut, toute sa vie durant, jetée en pâture au public avide de tout savoir sur elle.
Niciun comentariu:
Trimiteți un comentariu