Bette Davis
Films chroniqués sur DVDClassik
Acteur :
1931 : Waterloo bridge
1932 : 20 000 ans sous les verrous (20 000 Years in Sing Sing)
1934 : L'Emprise (Of Human Bondage)
1938 : L'Insoumise (Jezebel)
1949 : La Garce (Beyond the forest)
1950 : Ève (All About Eve)
1961 : Milliardaire pour un jour (Pocketful of Miracles)
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Les 20 plus belles performances de Bette Davis – classées !
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Pour marquer la sortie d'une version restaurée du mélodrame classique Now, Voyager, voici le meilleur de la reine de la méchanceté d'Hollywood, des comédies loufoques aux films d'horreur aux yeux fous.
Peter Bradshaw
20. Mort sur le Nil (1978)
Bette Davis en était à sa dernière ligne droite dans ce film d'Agatha Christie, avec une galerie de stars télé appelant une version améliorée de leurs personnages à l'écran. La scène se déroule sur un bateau à aubes des années 1930 descendant péniblement le Nil, à bord duquel une riche héritière a été abattue : l'Hercule Poirot de Peter Ustinov enquête et les soupçons se portent sur une Américaine grincheuse, Mme Va Schuyler, interprétée par Davis, qui aurait voulu mettre la main sur le collier de perles de la victime.
19. L'Étoile (1952)
C'est l'un des rôles gothiques « has-been » de Davis dont on se souvient le moins, un rôle qui est devenu sa spécialité en fin de carrière, mais qui lui a valu une nomination aux Oscars. Elle y incarne Maggie Elliot, une actrice de cinéma sur le déclin, aujourd'hui ruinée, sans emploi et confrontée à la terrible réalité de devoir trouver un emploi civil dans un grand magasin. L'histoire prend une tournure méta intrigante lorsqu'on lui propose enfin un film sur une ancienne star qui n'arrive pas à accepter la fin de sa carrière.

18. Le Bouc émissaire (1959)
Travaillant avec Alec Guinness et l'éminent réalisateur britannique Robert Hamer dans cette adaptation de Daphné du Maurier, Davis nous offre l'un de ses rôles les plus aboutis d'une femme alitée, mais avec une belle habileté lorsqu'elle veut descendre faire son entrée dans le salon. Guinness incarne un Anglais timide qui découvre qu'il a un sosie parfait : un mystérieux comte français qui échange sa place avec lui et le force à composer avec sa famille, y compris l'inévitable comtesse acariâtre (Davis), profondément méfiante face au nouveau comportement incompréhensible de son fils.
17. Juárez (1939)
Davis interprétait un rôle de reine dans sa phase « mélodramatique », lui laissant une large place pour dépeindre la hauteur, la névrose et un sentiment tragique et ambivalent de tout avoir. Son titre n'est rien de moins que celui de reine Carlota du Mexique, épouse de l'archiduc autrichien Maximilien (Brian Aherne) du XIXe siècle, intronisé monarque du Mexique par Napoléon III (Claude Rains). Mais cela met Maximilien et Carlota en conflit avec le populiste mexicain Benito Juaréz, interprété par Paul Muni, dont l'armée, soutenue par les Américains, incite Napoléon à retirer les forces françaises, laissant ainsi le pathétique roi et la reine fantoches exposés. Carlota, interprétée par Davis, vit un moment de désespoir et d'hystérie lorsqu'elle retourne à Paris pour convaincre Napoléon de changer d'avis.

16. Tout cela et le paradis aussi (1940)
Charles Boyer, d'une beauté exquise et d'une voix sonore, forme un duo idéal pour Davis dans cette histoire vraie se déroulant dans la France prérévolutionnaire des années 1840. Cependant, ces deux stars sont peut-être trop semblables dans leur timidité de diva pour constituer une romance réussie à l'écran. Davis adopte son personnage timide, doux et soumis (si différent de son style de méchante sardonique) pour incarner une gouvernante, Henriette. Son employeur, le duc de Praslin (Boyer), tourmenté par son mariage malheureux, tombe amoureux de cette jeune femme au caractère doux, que ses enfants adorent. Sa confrontation avec sa femme provoque des violences et un scandale politique, laissant Davis imprégnée d'une aura d'innocence martyre et de romantisme.
15. L'Homme qui est venu dîner (1942)
Cette comédie loufoque, adaptée de la pièce de théâtre de Moss Hart et George Kaufman, offre à Davis une rare occasion de se faire remarquer dans le monde de la comédie. Elle incarne Maggie Cutler, une vieille fille effacée, assistante d'un critique prétentieux, Sheridan Whiteside. Ce dernier, lors d'une tournée nationale de conférences, glisse sur la glace et se fracture la hanche devant la maison d'une famille locale influente. Il les convainc ensuite de l'héberger chez eux pendant sa convalescence. Alors qu'ils doivent composer avec cet invité aux exigences cauchemardesques, Maggie tombe amoureuse de Bert, journaliste local et dramaturge en herbe ; elle accepte de l'épouser et promet de montrer sa dernière pièce à Sheridan. Le critique, outré de se voir voler son assistant, feint d'admirer la pièce et s'arrange pour qu'un jeune acteur séduisant y participe, ce qui lui ravira Bert.
14. De la servitude humaine (1934)
Adapté de W. Somerset Maugham, ce film a fait de Davis une star, même si le rôle était plus sombre, acariâtre et antipathique que ceux qui l'ont rendue célèbre. Avec un accent londonien prononcé, Davis incarnait Mildred, une serveuse blonde, sexy et corpulente, qui fascinait un étudiant en médecine sensible et artiste en herbe, interprété par Leslie Howard. Son obsession pour cette femme qui n'éprouve pour lui qu'un mépris cruel a failli détruire sa vie. Un rôle théâtral et criard pour Davis, atypique à bien des égards, mais qui l'a incontestablement fait connaître.

13. La Vie privée d'Elizabeth et d'Essex (1939)
Davis incarne Élisabeth Ire dans un film relatant le flirt politique complexe de la reine vierge avec le comte d'Essex, interprété par Errol Flynn. (Ces acteurs avaient tous deux 31 ans – l'âge d'Essex à ce moment historique, bien que la reine Élisabeth en ait 63, et Davis est donc lourdement maquillée.) La reine incarnée par Davis est profondément attirée par le bel Essex, qui vient d'écraser les Espagnols en son nom à la bataille de Cadix. Leur alchimie sexuelle est quelque peu intensifiée par sa crainte de son ambition, de sa déloyauté et de sa popularité, ainsi que par sa possible relation avec Lady Penelope Grey, interprétée par Olivia de Havilland. Comme cela arrive parfois à Davis dans un drame romantique, elle se fait un peu voler la vedette par le personnage principal masculin, plus prétentieux.
12. Chut… Chut, douce Charlotte (1964)
Ce film fait suite à Qu'est-il arrivé à Baby Jane ? et c'est un autre rôle à la Miss Havisham que Davis a su interpréter avec brio. Elle y incarne Miss Charlotte, une belle du Sud vieillissante et solitaire, hantée par le mystérieux meurtre non résolu de son amant marié, commis 30 ans auparavant. Les autorités locales cherchent maintenant à faire démolir sa propriété pour construire une nouvelle autoroute, et Charlotte fait appel à une jeune cousine bien informée sur la famille pour l'aider dans cette affaire. Il s'agit de Miriam (Olivia de Havilland), et l'action en justice réveille toutes sortes de fantômes du passé. Un jeu d'acteur gothique réussi de la part de Davis, même si elle aurait vraiment eu besoin d'un autre titan comme Joan Crawford pour l'incarner.
11. Monsieur Skeffington (1944)
Ce grand mélodrame sur le thème de l'antisémitisme regorge de scènes d'escalier sensationnelles, avec Davis dans sa forme la plus antipathique. Elle incarne Fanny, vaniteuse, gâtée et écervelée, qui – si elle aime quelqu'un – aime son frère Trippy, tout aussi gâté. Lorsqu'il est soupçonné d'avoir volé son employeur juif, M. Skeffington (Claude Rains), Fanny comprend qu'elle doit séduire cet homme et le convaincre de l'épouser, pour éviter à son bien-aimé Trippy de finir en prison. Ainsi débute le mariage des Skeffington, dans toute sa tristesse et sa malhonnêteté, M. Skeffington étant parfaitement conscient des sentiments des bigots à son égard et du peu d'intérêt que sa coquette épouse porte à cela ou à quoi que ce soit d'autre. Un rôle délicieusement pervers pour Davis, même si elle se rachète à la fin.
10. Dangereux (1935)
Cela a valu à Davis l'un de ses deux Oscars, pour un rôle qui rappelle par certains aspects sa percée dans « Des liens humains », mais avec une interprétation bien plus sympathique et accessible. Elle y incarne Joyce, une actrice au chômage obsédée par l'idée qu'elle porte malheur à quiconque se rapproche d'elle. Elle rencontre Don ( Franchot Tone ), un architecte qui tombe amoureux de la fascinante et impétueuse Joyce, bien qu'il soit déjà fiancé. Il risque alors sa fortune pour soutenir Joyce dans un nouveau spectacle, ce qui entraîne un tourbillon émotionnel de tristesse, Davis savourant visiblement sa position au centre de tout cela.

9. La Lettre (1940)
Autre adaptation de Somerset Maugham, ce mélodrame noir, librement inspiré d'un scandale réel, a offert à Davis l'une de ses plus belles entrées au cinéma. Le film s'ouvre la nuit dans une plantation coloniale de caoutchouc en Malaisie, où des ouvriers indigènes somnolent ou jouent aux cartes. Ils lèvent les yeux, stupéfaits, au bruit des coups de feu ; un homme sort en titubant de la maison principale tandis que Davis le suit calmement, le percutant de balles tandis que la caméra s'approche pour un gros plan sur sa beauté magnifiquement indifférente. Davis incarne Leslie Crosbie, l'épouse du directeur de la plantation ; lors de son procès, elle affirmera que cet homme tentait de la violer ; mais une lettre prouve qu'elle a organisé un rendez-vous secret. Bien qu'elle maintienne qu'il s'agissait d'une défense contre une tentative de viol, Leslie doit maintenant tenter de récupérer cette lettre. Une performance saisissante, adulte et magistrale.
8. Dead Ringer (1964)
Davis incarne des jumelles dans ce thriller à suspense très divertissant, réalisé par l'acteur Paul Henreid. Elle incarne à la fois la veuve Margaret et sa sœur Edith, une célibataire aigrie et débraillée qui a fréquenté l'homme riche que Margaret a épousé après l'avoir trompé en prétendant être enceinte. Furieuse, Edith a maintenant un plan pour tuer Margaret et faire passer son suicide pour un suicide afin de pouvoir s'immiscer dans la vie riche et confortable de sa sœur. C'est une performance un peu guignoliste, et l'idée même des « jumelles » a peut-être tenté Davis de faire des bêtises, mais elle reste néanmoins divertissante.

7. Jézabel (1938)
Un rôle classique de belle du Sud pour Davis, qui lui a valu le deuxième de ses deux Oscars, et une nouvelle belle démonstration de ce que Graham Greene appelait sa « beauté phosphorescente ». Dans la Nouvelle-Orléans d'avant-guerre, Julie, le personnage de Davis, est fiancée au président Dillard, un banquier interprété avec une rectitude absolue par Henry Fonda. Sa fiancée capricieuse accède au statut de Jézabel en insistant pour venir au prestigieux bal de l'Olympe vêtue d'une robe rouge éclatante plutôt que du blanc immaculé attendu des célibataires. Furieux et humilié, le président se marie avec quelqu'un d'autre, ce qui emplit Julie d'un profond désir de vengeance qui mène à la tragédie. Un classique du jeu d'acteur aristocrate américain de la part de Davis.
6. La Femme marquée (1937)
C'est ce drame policier audacieux qui a relancé Davis dans le monde du studio après une dispute très publique avec Warner Bros concernant la qualité des scénarios qu'on lui demandait. Celui-ci, en tout cas, a rencontré son approbation : l'histoire d'un procureur en campagne (interprété par Humphrey Bogart) qui lutte pour arrêter un racketteur notoire qui dirige une chaîne d'hôtesses de boîte de nuit, dont le travail consiste à inciter les clients à boire et à jouer. L'une de ces hôtesses est Mary, interprétée par Davis, terrifiée à l'idée d'être une « femme marquée » si elle refuse quoi que ce soit à son patron. Une performance franche, quoique légèrement monocorde.

5. Les Petits Renards (1941)
Davis a livré une performance époustouflante dans le film de William Wyler, inspiré d'une pièce de Lillian Hellman. Elle y était à l'orée de la jeunesse et de la maturité, visiblement sur le point de passer d'une figure manipulatrice et enfantine à une femme d'âge mûr, hautaine et dédaigneuse, mais secrètement hantée. Une fois de plus, elle incarne une belle du Sud (Davis était en fait originaire de Lowell, dans le Massachusetts) ; Regina Giddens est une femme mariée, mécontente de ne pas être aussi riche que ses frères, héritiers légaux de la fortune de leur père. Elle négocie donc une part plus importante du projet de nouvelle filature de coton des frères en échange du financement de son mari malade, ce qui provoque une confrontation houleuse avec son époux épuisé, qui comprend enfin combien elle le méprise, et peut-être aussi elle-même. Le visage de Davis est un masque tragique de peur et de désarroi.
4. Victoire noire (1939)
Voici le mélodrame émouvant et décomplexé qui a valu à Davis une nouvelle nomination aux Oscars et lui a permis de jouer avec l'acteur qu'elle surnommait « Petit Ronnie Reagan ». Glamour et les yeux écarquillés, comme émerveillée par sa propre beauté, Davis incarne Judith Traherne, une mondaine insouciante qui aime faire la fête, fumer et boire. Après d'étranges vertiges et des moments d'oubli, Judith se laisse convaincre de consulter un spécialiste, le Dr Steele, interprété par son partenaire de longue date George Brent. Ce dernier diagnostique une tumeur au cerveau et réalise qu'il ne lui reste plus beaucoup de temps à vivre et que sa mort sera précédée d'une courte période de cécité. Submergé par la compassion et la galanterie romantique, le Dr Steele tombe amoureux de Judith et l'épouse, tout en se résolvant à cacher la gravité de son état à sa future épouse jusqu'au bout.

3. Qu'est-il arrivé à Baby Jane ? (1962)
Au début des années 60, Davis a trouvé le moyen de rester pertinente à Hollywood, où elle aurait pu simplement devenir une has-been – en satirisant, de la manière la plus féroce et la plus brillante, non seulement sa propre personnalité, mais aussi l'engouement de l'Amérique moderne pour le culte de la jeunesse. Elle partage l'affiche de ce drame troublant avec sa rivale acharnée Joan Crawford , et le film a fait des merveilles pour leurs carrières respectives. Davis incarne « Baby » Jane Hudson, une ancienne enfant star du vaudeville qui a sombré dans l'alcoolisme et le délire une fois adulte. Elle vit dans une demeure délabrée financée par sa sœur aînée Blanche (Crawford), devenue actrice à Hollywood après l'échec de Jane, mais qui a elle-même connu des moments difficiles après une grave blessure dans un accident de voiture. Aujourd'hui, ces deux beautés ruinées vivent ensemble dans une intimité haineuse et paranoïaque. Bien sûr, la performance de Davis est colossalement exagérée et déjantée, et son ancienne ingénue aux yeux écarquillés est devenue un monstre qui fait lever les yeux au ciel. Mais c'est un spectacle fascinant et étrange – et une performance classique de Davis.
2. Maintenant, Voyager (1942)
C'est le mélodrame romantique le plus passionné et le plus engagé de Davis, adapté du best-seller aujourd'hui oublié d'Olive Higgins Prouty. C'est aussi peut-être le film le plus abouti techniquement de Davis, avec une immense scène de transformation. Elle incarne Charlotte, qui débute le film en vieille fille timide et refoulée (un classique de Davis), dominée par une mère autoritaire, interprétée par Gladys Cooper. Finalement, Charlotte s'échappe pour passer du temps dans un sanatorium dirigé par Claude Rains, un homme astucieux mais bienveillant. Charlotte s'épanouit miraculeusement en une belle jeune femme confiante qui part en croisière et y rencontre Jerry Durrance (Paul Henreid), un homme marié, sensible et intelligent ; ils tombent passionnément amoureux. La rédemption émotionnelle de Charlotte réside dans l'amitié et le mentorat qu'elle trouve auprès de la jeune fille de Jerry, ce qui donne un sens à sa vie. Malgré son côté ringard et son extravagance, Now, Voyager a quelque chose de véritablement émouvant, et cela est dû à la magnifique performance de Davis.

1. Ève (1950)
« Attachez vos ceintures, la nuit va être agitée. » Le film de Joseph Mankiewicz est le chef-d'œuvre de Davis, une comédie dramatique noire et entraînante qui joue une fois de plus sur le personnage du has-been, mais en le rendant plus dérangeant. Il montre comment le has-been était autrefois un imbécile, délogé de sa position par le coucou dans son nid. Mankiewicz a adapté son film d'après la nouvelle La Sagesse d'Ève de Mary Orr, inspirée de l'actrice viennoise Elisabeth Bergner .
Davis incarne Margo Channing, une brillante star de Broadway d'un certain âge qui ne jouera peut-être plus de rôles principaux romantiques bien longtemps. Un soir, elle rencontre une admiratrice dévouée, Eve (Anne Baxter), qui lui raconte son histoire de veuve de guerre. Margo, au grand cœur, lui offre un poste d'assistante et Eve se rend indispensable et, à l'insu de Margo, s'arrange pour devenir sa doublure. La star comprend bientôt comment sa protégée complote pour prendre le contrôle de sa carrière et de sa vie. Davis boit, fume, porte des robes et secoue les cheveux en l'air, et le scénario, superbement incisif et plein d'esprit, donne du sens à son cynisme et à sa méfiance. L'amitié et l'inimitié féminines ont toujours été les maîtres mots de la carrière de Davis, tout comme la peur de l'échec et la peur de la mort, mais elles n'ont jamais été présentées avec autant d'humour et d'insouciance (avec de superbes seconds rôles de George Sanders, Celeste Holm et Marilyn Monroe). Davis, avec son don pour les dialogues acides, attendait ce rôle avec impatience.
Bette Davis, excédent bagage
ActualitésFestival La Rochelle CinémaFestivals
Publié le 3 juillet 2023 par
RETROSPECTIVE. Jusqu’au 9 juillet, le Fema La Rochelle propose un parcours en neuf films à travers la filmographie fournie de l’héroïne d’Ève.
Des neuf films de la rétrospective, Une femme cherche son destin d’Irving Rapper mérite à lui seul le voyage. Ce mélodrame de 1941 s’appelle d’ailleurs en VO Now, Voyager, d’après un poème de Walt Whitman au titre magnifique, « The Untold Want », le désir non-dit, expression qu’on est tenté d’associer à l’actrice de Chut, chut, chère Charlotte de Robert Aldrich. Chut, mais Davis commence au début du parlant, et dira dans ses mémoires que c’est la nécessité d’apprendre et de comprendre son texte qui a permis à elle et à d’autres « pas beaux » (dont elle fait la liste : Katharine Hepburn, James Cagney, Humphrey Bogart) d’être attirés à Hollywood. Est-ce un hasard si les acteurs de cette liste ont des yeux énormes, voire globuleux comme les siens ? C’est comme si la stylisation du masque muet, avec eux, sortait de ses gonds, paradoxe puisque l’apparition de dialogues aurait dû atténuer la surexpressivité. À l’accusation d’en faire trop, Bette Davis répondait qu’elle évoluait parmi d’autres acteurs atones, d’où un effet trompeur d’excès.
L’actrice de La Vieille Fille (Edmund Goulding, 1939) et de La Lettre (William Wyler, 1940) captive surtout par un autre paradoxe : ses yeux immenses et ses lourdes paupières ont beau attirer le regard, ils n’éclipsent jamais l’entièreté de son corps, de sa gestuelle impérieuse, bouillant d’un souci de mettre en travail toutes ses ressources physiques. Anne-Capucine Blot, dans le bref parcours biographique qu’elle lui consacre chez Capricci¹, relève cette capacité apprise grâce aux cours de la chorégraphe Martha Graham, et qui permet tôt à Davis de « tomber gracieusement des escaliers » dans une pièce mise en scène par Cukor où elle décroche un petit rôle, avant une suivante avec le même metteur en scène intitulée, en un augure significatif, Excess Baggage. C’est déjà tout son corps qui faisait que Jezebel, la jeune aristocrate du Sud de L’Insoumise de Wyler (1938), aïeule cachée de Carrie, s’entêtait à porter une robe cramoisie au bal des débutantes, quitte à perdre son fiancé (« On est en 1852, pas au Moyen Âge ! »). Son dépit amoureux met le feu à la ville dans un final où la fièvre jaune mêle à l’histoire d’amour un drame du confinement.
Jezebel, le personnage, paie cher le refus de la robe blanche, par fierté et par féminisme ; Bette Davis a eu cette même insistance, ce désir de lutter contre le système des studios mais de l’intérieur (elle perd un procès contre la Warner, qui la réintègre quand même) : amère victoire, amère défaite – même combat. Mieux vaut aller jusqu’au bout de ses pulsions, comme il fallait, après le muet, dépasser le masque en ajoutant une couche de fard – jusqu’à la hagploitation devenue un sous-genre dans Qu’est-il arrivé à Baby Jane ? (1963). Quinze ans avant la poupée ridée d’Aldrich, sa Rosa Moline de La Garce (King Vidor) est à peine moins excessive. Femme de médecin, cette Emma Bovary du Wisconsin échoue à garder son amant, dont elle est tombée enceinte. Sans que ce ne soit dit, elle semble mourir à la fin d’un avortement clandestin. Un personnage de jeune bonne indienne qui jure comme une charretière crée un malaise autant à cause du jeu redface de l’actrice, que parce qu’elle s’offre en double à Rose Moline, résurgence d’un passé américain mal mis sous le tapis, en un alliage âcre entre oppression collective et frustration sexuelle. La fin de La Garce saisit aussi par la temporalité ductile de l’agonie de Rose. Alitée, elle décide de partir tout de même, de quitter son bled, « cercueil où on a l’impression d’attendre d’être enterrée », cherche l’horaire du train vers Chicago et ses sandales noires, les plus sexy, se maquillant de travers avec 40º de fièvre, en une coda expressionniste du film qui montre la petite ville comme une fournaise allumée par elle, fumée et vapeurs, corps en surchauffe.
Bouger jusqu’au bout, partir, quitte à ramper, à mourir sur le quai d’une gare, à ne plus avoir l’énergie d’une Karenine pour se jeter sous un train : c’est de cette endurance-là, « pas belle », qu’est aussi faite la carrière de Davis. D’où la beauté d’Une femme cherche son destin, certes moins faisandé : l’effet-Cendrillon qui animera dans la génération suivante les « Audrey Hepburn films » (Sabrina, Ariane, Vacances romaines) y est ici abordé avec une précision triviale, au sourcil près : la Charlotte Vale de Davis, chez Rapper, a les sourcils trop fournis, des lunettes et un chignon trop strict, et Now, Voyager montre dans le détail sa métamorphose de chenille en papillon, révélant sans le dire rien d’autre que la fabrication d’un film, la starification d’un visage. Maîtresse d’un homme marié à une femme malade, Bette Davis doit se résoudre à une amitié amoureuse. Elle lui lâche, devant un ciel nocturne : « Ne demandons pas la lune, nous avons déjà les étoiles » ) : réplique d’une insauvable mièvrerie si elle avait été jouée par d’autres qu’elle. Les étoiles, stars, en effet, les spectateurs les ont, et semble-t-elle leur dire, c’est déjà beaucoup. Ce plaidoyer pour sa propre longévité au firmament hollywoodien sera à n’en pas douter au centre de la table ronde à laquelle participera le 4 juillet Murielle Joudet, dont l’essai La Seconde Femme² affichait en bandeau la citation célèbre de Davis « la vieillesse, c’est pas pour les mauviettes ». Dans un texte signé dans le catalogue du Fema, Joudet écrit que l’actrice avait le don d’« augmenter la quantité d’énergie qu’un film est en mesure d’accueillir ».
Charlotte Garson
¹ Bette Davis, fatiguée d’être moi, Capricci, Stories, 2023.
² La Seconde Femme, Premier Parallèle, 2022
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Bette Davis, une star insoumise en 5 rôles
DIAPORAMA PAYSAGE. A l'occasion d'un cycle de projections et conférences à la Cinémathèque Française dédié à Bette Davis jusqu'au 4 Août, retour sur la carrière de cette actrice au caractère bien trempé.

EVE (ALL ABOUT EVE) de Joseph L. Mankiewicz 1950 USA avec Bette Davis et Gary Merril
L'Express