duminică, 11 decembrie 2022

LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931)

 LE FILM ÉTRANGER

LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931)

« Et, R-I-C-O, le Petit César, c’est qui ! » braille Edward G. Robinson au téléphone. Hollywood comprend vite le message : alors âgé de 37 ans et loin des canons de beauté habituels de l’époque, Robinson n’en est pas moins une star de premier plan. Qui plus est, les cinéphiles plébiscitent les films de société sans complaisance sur la Grande Crise de 1929 : un genre qui fera le succès de la Warner Bros.

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

Le film retrace l’histoire de Caesar Enrico Bandello, truand bagarreur ultra-blasé, sans attaches – pour ainsi dire sans ami – et totalement dépourvu d’un quelconque sens de la diplomatie auprès de la pègre locale. Robinson, à l’origine collectionneur d’art et farouchement opposé aux armes à feu (dans le film ses paupières étaient maintenues par du ruban adhésif pour l’empêcher de cligner des yeux à chaque fois qu’il tirait), verra son image à jamais associée à l’archétype du gangster.

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

L’histoire : On pourrait la résumer en quelques mots à peine : ascension, apogée et chute d’un gangster. Deux petits truands Italo-américains, Cesare Rico Bandello (Edward G. Robinson) et Joe Massera (Douglas Fairbanks Jr.), décident de gravir les échelons de la pègre. Pour parvenir plus rapidement à leurs fins, les deux amis s’intègrent à la bande de Sam Vettori (Stanley Fields). Ce dernier est rapidement supplanté par Rico qui devient, sous le surnom de Little Caesar, un des gangsters les plus redoutés du Milieu et de la police. Tandis que Rico se livre à une lutte sans merci contre des bandes rivales, Joe délaisse son ami pour se consacrer à sa carrière de danseur professionnel et à sa partenaire, Olga (Glenda Farrell), dont il est amoureux. C’est elle qui dénonce Rico à la police pour sauver Joe. Traqué par la police, Rico est finalement abattu.

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

Quand Hal B. Wallis décida de réaliser, pour la Warner Bros, Little Caesar, le massacre de la Saint-Valentin était encore présent dans les mémoires (il avait eu lieu le 14 février 1929) et son principal instigateur, AI Capone, était toujours en liberté (il fut arrêté pour fraude fiscale l’année suivante). En outre, l’Amérique se trouvait soumise au régime de la prohibition : l’interdiction de la fabrication et de la vente d’alcool, qui avait favorisé la contrebande et le banditisme le plus sauvage, n’allait être levée que trois ans plus tard.
On peut mieux saisir, grâce à cet éclairage historique, l’indiscutable actualité du film et son impact sur le public.

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

Pourtant, il serait erroné de considérer Little Caesar comme le premier film de gangsters de l’histoire du cinéma américain.
Bien avant la sortie du film, au début de 1931, les spectaculaires méfaits de la pègre avaient déjà été exploités à l’écran par plusieurs metteurs en scène, au premier rang desquels il faut placer Josef von Sternberg avec Underworld (Les Nuits de Chicago, 1927) et Lewis Milestone avec The Racket (1928), adapté d’un grand succès théâtral de la saison précédente. Il est à noter qu’un certain Edward G. Robinson jouait précisément dans cette pièce et que ce même acteur interpréta, en 1930, un autre rôle de chef de bande dans The Widow From Chicago, un film produit par Hal B. Wallis.

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

Adapté d’un best-seller du roman noir écrit par W.R. Burnett, Little Caesar se concentre sur l’étude d’un personnage, Rico, le suivant pas à pas tout au long de sa courte et brutale carrière. Le rôle principal revenait presque de droit à Edward G. Robinson ; pourtant, au départ, Wallis songea à lui confier un personnage secondaire, Otero. Dans ses souvenirs « All my Yesterdays », Robinson raconte qu’il considéra cette décision comme une ruse destinée à assouplir le tempérament de l’acteur débutant.
Edward G. Robinson refusa tout net car le rôle qu’on lui proposait lui déplaisait à plus d’un titre. Ce qu’il briguait c’était d’incarner Rico, qu’il ressentait profondément en tant qu’acteur.

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

Son obstination à tenir le rôle principal, au lieu de celui d’Otero, trop verbeux à son goût, n’était pas sans panache. Ayant signé un contrat, Robinson ne pouvait pas, en principe, refuser ce qu’on lui imposait, sous peine de se voir priver de travail pendant plusieurs mois. La distribution de ce rôle est intéressante pour la petite histoire des grandes stars de Hollywood. Jack Warner songeait à Douglas Fairbanks Jr. (qui incarnera en fait Joe Massera) ; LeRoy lui aurait préféré un débutant auquel il avait même fait tourner un bout d’essai. Mais Zanuck, effaré par la taille des oreilles du jeune acteur refusa : l’heure de Clark Gable n’avait pas encore sonné.

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931). Le réalisateur pose avec Edward G. Robinson, (il tient une mitraillette Thompson : modèle utilisé dans le film).

Après avoir contesté une première adaptation du roman de Burnett, qu’il jugea sans envergure et trop semblable aux histoires de gangsters traditionnelles, Robinson accepta une nouvelle version qui correspondait davantage à son idée du personnage. Il s’en expliqua plus tard en rapportant ses discussions avec Wallis : « Ce n’était pas un truand de troisième zone ; cela relevait plutôt de la tragédie grecque. Il y avait, sous-jacent, le drame du plus humble et du plus déshérité cherchant à se frayer un chemin hors de l’anonymat. Le but de cet homme était d’arriver à une situation où il ne serait plus noyé parmi tant d’autres, mais où il serait maître de son destin. A sa manière, très spéciale bien sûr, c’est un personnage hautement moral. En défiant la société, il est finalement écrasé par elle. En quelque sorte, Rico ressemble à Macbeth, à Othello, à tous les grands héros des tragédies grecques ou des drames shakespeariens. »  

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

Cette interprétation dépassait largement le propos de Burnett qui s’était attaché, avec une économie de moyen touchant à l’épure, à l’étude d’un cas bien particulier. Son jeune gangster, dévoré par une volonté de puissance démesurée, relevait sans doute plus de la pathologie que de la tragédie grecque. Pour s’en faire une idée il suffit de lire la description qu’il donne de son héros : « Rico était un homme simple : il n’aimait que trois choses au monde : lui-même, ses cheveux et son revolver… et de ces trois choses, il prenait un soin extrême. » Avec Robinson, Rico allait atteindre une autre dimension. La séquence finale est à cet égard exemplaire : vaincu, à l’agonie, le jeune gangster abandonné de tous, étonné de sa propre fin s’adresse au ciel – tels les grands héros interpellant les dieux à l’instant suprême : « Mère de miséricorde, est-ce la fin de Rico ? »  

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

Comme eux, il connaît des faiblesses qui lui seront fatales, en l’occurrence son amitié pour Joe Massera. On a même interprété cette amitié chez un homme par ailleurs incapable de sentiments comme un signe d’homosexualité latente, certains trouvant confirmation de cette théorie dans son attachement obsessionnel à sa mère.
Il est vrai que Rico supporte mal la relation amoureuse entre Joe et sa compagne, qu’il fait tout pour y mettre un terme et que, précisément, c’est cette femme qui sera cause de sa perte.

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LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson, Douglas Fairbanks Jr., Glenda Farrell

Si le film doit beaucoup à l’excellente prestation de Robinson, qui prête sa silhouette trapue et sa laideur inquiétante au personnage de Rico, il vaut autant, malgré quelques faiblesses imputables à une utilisation un peu maladroite du parlant, par la mise en scène de LeRoy. Nerveuse, souvent elliptique, elle va droit à l’essentiel. La rapidité de l’action, les dialogues dépouillés, les personnages secondaires fortement campés, la recherche d’authenticité dans les décors en font un film d’anthologie.  [La grande histoire illustrée du 7ème art – Editions Atlas (1983)]

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LES EXTRAITS

 

 

 

 



LITTLE CAESAR (Le Petit César) – Mervyn LeRoy (1931)
« Et, R-I-C-O, le Petit César, c’est qui ! » braille Edward G. Robinson au téléphone. Hollywood comprend vite le message : alors âgé de 37 ans et loin des canons de beauté habituels de l’époque, Robinson n’en est pas moins une star de premier plan. Qui plus est, les cinéphiles plébiscitent les films de société sans complaisance sur la Grande Crise de 1929 : un genre qui fera le succès de la Warner Bros.

THREE ON A MATCH (Une Allumette pour trois) – Mervyn LeRoy (1932)
Three on a match est l’une des œuvres les plus saisissantes de la période du Pré-Code, autant par son intrigue, qui met en scène une mère bourgeoise plongeant dans les abysses de la pègre et de la drogue, et y sacrifiant son mariage et son fils, que par l’inventivité avec laquelle Mervyn LeRoy exprime le thème profond de son film : le passage du temps. Pour cela, tel les peintres contemporain se livrant à des collages, il mobilise les accessoires de la modernité, comme des manchettes de journaux, des illustrations, des publicités, afin de scander les années durant lesquelles les trois héroïnes, chacune de leur côté, mûrissent, en relation avec l’époque…

JOHNNY EAGER (Johnny, roi des gangsters) – Mervyn Le Roy (1942)
A mi-chemin entre le drame psychologique et le film traditionnel, Mervin Le Roy décrit deux mondes que tout semble opposer, s’attachant au passage aux femmes qui gravitent autour de Johnny et surtout au très curieux personnage de Jeff (Van Heflin, oscarisé pour ce rôle), l’historiographe du gangster pour lequel il a une évidente admiration. Robert Taylor n’est plus le séducteur du Roman de Marguerite Gauthier (Camille, 1936) mais un homme au double visage face à Lana Turner découvrant ici un univers trouble qui l’étonne et la fascine. 




THE RACKET (Racket) – John Cromwell (1951)
La corruption dans Racket n’est pas une entité abstraite : elle est le produit de désirs, d’ambitions et de compromis qui agitent la ville entière : le film ne fait d’ailleurs aucune distinction moralisatrice entre le bien et le mal. Les personnages, même les pires, ne sont pas fondamentalement mauvais, sadiques, ou vraiment dangereux.


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ROBERT SIODMAK (1904 - 1973)