Titre original : Witness for the Prosecution Sortie US : 1957 Durée : 116 min (1 h 56) Langue : Anglais Edward Small Productions Noir et Blanc |
Le Casting Tyrone Power ... Leonard Stephen Vole Marlene Dietrich ... Christine Helm Vole Charles Laughton ... Sir Wilfrid Robarts Elsa Lanchester ... Miss Plimsoll John Williams ... M. Brogan-Moore Henry Daniell ... M. Mayhew Ian Wolfe ... M. Carter Torin Thatcher ... M. Myers Norma Varden ... Emily Jane French Una O'Connor ... Janet McKenzie Francis Compton ... Juge Philip Tonge ... Inspecteur Hearne Ruta Lee ... Diana | Equipe du film D'après un roman d'Agatha Christie Réalisateur : Billy Wilder Scénaristes : Larry Marcus, Billy Wilder et Harry Kurnitz Producteurs : Arthur Hornblow Jr. et Edward Small Musique : Matty Malneck Image : Russell Harlan Montage : Daniel Mandell Son : Fred Lau Direction Artistique : Alexandre Trauner Décors : Howard Bristol Costumes : Edith Head Maquillage : Gustaf Norin, Harry Ray, Ray Sebastian et Wally Westmore Coiffeur : Nellie Manley et Helene Parrish Département d'Art : Stanley Detlie |
L'histoire
Londres, années 50. A peine remis d'un infarctus qui a failli le terrasser, Sir Wilfrid Robarts, ténor du barreau, qui ne devrait plus plaider pour se préserver, rentre à son cabinet accompagné par Miss Plimsoll, une infirmière chargée de veiller sur lui pendant sa convalescence. Il accepte de prendre la défense de Leonard Stephen Vole, un ancien officier de la R.A.F., inventeur sans emploi et sans le sou, accusé du meurtre d'Emily Jane French, une riche veuve dint il venait de faire la connaissance. Il l'aurait assassiné pour hériter de son argent puisque huit jours avant son décès, elle modifiait son testament, lui léguant 80 000 livres. Toutefois, Sir Robarts, lui, est certain de l'innocence de son client ; même si les choses se compliquent lorsqu'il rend visite à Vole en prison et qu'il apprend la présence de sang sur le vêtement porté par l'accusé le jour du meurtre. Vole déclare s'être coupé accidentellement.
Le seul espoir d'être innocenté pour M. Vole réside dans le témoignage de sa femme Christine. Il a épousé celle-ci à Hambourg en 1945 tandis qu'elle vivait dans la misère. Elle voyait dans ce mariage l'opportunité de quitter son pays en ruine et d'améliorer sa situation. Malheureusement, l'épouse du prévenu accable celui-ci, contredisant les dires de son mari tels que l'heure à laquelle il est rentré le soir du meurtre. La crédibilité de Christine est remise en cause lorsqu'une femme anonyme livre la preuve à Sir Wilfrid Robarts que celle-ci a un amant nommé Max. Finalement, les jurés acquittent Leonard Stephen Vole... Mais l'histoire n'est pas finie ! On apprend alors que Leonard est le véritable assassin de Mme French et que Christine s'est opposée à lui car le témoignage d'une épouse aimante n'a guère de poids devant un jury. La femme anonyme qui a donné les lettres de Christine adressées à ce soit-disant Max à Sir Robarts n'est autre que Christine elle-même... L'avocat s'est fait abuser mais il n'est pas le seul. Leonard a une maîtresse et s'est servi de Christine pour se sortir d'affaire. Désabusée, elle le poignarde et il décède alors... Elle l'a éxécuté comme le dit Sir Robarts...
Nominations et récompenses
Six nominations aux Oscars en 1958 :
- Nomination du meilleur acteur pour Charles Laughton
- Nomination du meilleur second rôle féminin pour Elsa Lanchester
- Nomination du meilleur réalisateur pour Billy Wilder
- Nomination du meilleur montage pour Daniel Mandell
- Nomination du meilleur film pour Arthur Hornblow Jr.
- Nomination du meilleur son pour Gordon Sawyer
- Golden Globes du meilleur second rôle féminin pour Elsa Lanchester en 1958
- Nomination pour le Golden Globe du meilleur film dramatique
- Nomination pour le Golden Globe du meilleur acteur dramatique pour Charles Laughton
- Nomination pour le Golden Globe de la meilleure actrice dramatique pour Marlene Dietrich
- Nomination pour le Golden Globe du meilleur réalisateur pour Billy Wilder
- Prix du meilleur acteur étranger pour Charles Laughton décerné par le BAFTA
- Nomination au prix Edgar Pœ du meilleur film pour Billy Wilder et Harry Kurnitz en 1958
- Seconde place au prix d'or Laurel pour Marlene Dietrich en 1958
- Quatrième place au prix d'or Laurel en tant que film dramatique en 1958
- Nomination au prix de la Directors Guild of America pour Billy Wilder en 1958
Informations
- Le budget du film s'élève à 3 000 000 $.
- Avec plus de 2 milliards d'exemplaires vendus de ses œuvres, Agatha Christie est l'un des auteurs les plus populaires du XXème siècle et son œuvre a fait l'objet d'innombrables adaptations au cinéma. Extrêmement exigeante et sévère à l'égard de toutes ces transpositions pour le grand écran, la romancière aurait déclaré à propos de Witness for the Prosecution qu'il s'agissait de "la première adaptation correcte d'un de ses romans".
- N'hésitant pas à prendre quelques libertés en adaptant la fameuse pièce d' Agatha Christie, Billy Wilder et son coscénariste Harry Kurnitz inventent ainsi le personnage de Miss Plimsoll, une infirmière joviale qui force l'avocat Robarts à recouvrer la santé et qui le protège de l'agitation entourant sa nouvelle affaire de meurtre.
- Contrairement au précédent film de Billy Wilder, Ariane (1957) qui réunissait Audrey Hepburn et Gary Cooper, la lubricité des personnages de Leonard et Christine Vole est plutôt malsaine et brutale. Christine épouse Léonard afin de pouvoir échapper au Berlin d'après-guerre, une situation qui rappelle le précédent rôle de Dietrich pour Wilder dans A Foreign Affair (La Scandaleuse de Berlin, 1948).
- Comme le personnage de Lucy interprété par Diana Lynn dans The Major and the minor (Uniformes et jupon court, 1942), Elsa Lanchester incarne dans Witness for the Prosecution l'une des figures récurrentes du cinéma de Billy Wilder en campant un attachant personnage comique qui guide les réactions du public durant le procès à la manière des chœurs antiques.
- Mémorable femme synthétique aux grâces d'automate et à la chevelure zébrée de deux éclairs blancs dans Bride of Frankenstein (La Fiancée de Frankenstein, 1935), Elsa Lanchester donne, dans Témoin à charge, la réplique à Charles Laughton, son époux à la ville et qu'elle a déjà affronté à l'écran, notamment dans The Private Life of Henry (La Vie privée d'Henry VIII, 1933). Ce film de Billy Wilder sera d'ailleurs leur dernière collaboration et la comédienne publiera quelques années plus tard leurs souvenirs communs sous le titre Charles Laughton and I.
- La carrière scénaristique de Billy Wilder est principalement marquée par deux longues collaborations, la première avec Charles Brackett, la seconde avec I.A.L Diamond à partir de 1957, et Ariane qui précède Witness for the Prosecution qui sera donc le dernier film écrit sans son nouveau partenaire.
- C'est sur le personnage de Sir Wilfrid Robarts que sont centrés les principaux morceaux de bravoure verbaux et visuels, son monocle lui servant par exemple de détecteur de mensonges en reflétant la lumière du soleil comme le faisceau d'une lampe d'interrogatoire. Un rôle magistral qui a échu à Charles Laughton à qui Billy Wilder vouait une amitié doublée d'une admiration sincère. Ce sera d'ailleurs leur unique collaboration, d'importants problèmes de santé empêchant en définitive le comédien de jouer le rôle que Wilder lui avait écrit pour Irma la Douce (1963).
- Witness for the Prosecution est le dernier film de Tyrone Power qui mourut peu de temps après son achèvement.
- Le film a été montré en avant-première à la famille Royale d'Angleterre, mais celle-ci a dû promettre à l'avance de ne révéler la surprise finale du film à personne tandis que les personnes ayant participé au tournage ont dû également signer un contrat stipulant qu'ils ne dévoileraient rien non plus.
- Incertain sur sa capacité de tenir le rôle d'un malade cardiaque, Charles Laughton a simulé une attaque dans sa piscine. Affolée, Elsa Lanchester, aidée par un invité, s'est immédiatement portée à son secours et ensemble l'ont sorti de l'eau. Ce n'est qu'une fois au sec que l'acteur a révélé son stratagème. L'histoire ne dit pas qu'elle fut la réaction d'Elsa.
- Una O'Connor était le seul membre du casting original de la pièce de Broadway à reprendre son rôle pour le film.
- Afin de montrer juste une de jambes célèbres de Marlene Dietrich, une scène entière a été écrite. Elle requit 145 figurants, 38 cascadeurs et 90 000 $.
- Marlene Dietrich était si certaine qu'elle serait nominée pour les Oscars qu'elle a enregistré une nouvelle introduction pour son show de Las Vegas mentionnant sa nomination. Elle n'a pas été nominée...
- Witness for the Prosecution fut le dernier grand film cinématographique d'Una O'Connor.
- En 1982, un remake de Witness for the Prosecution a été fait pour la télévision avec Ralph Richardson, Deborah Kerr, Beau Bridges, Donald Pleasence, Wendy Hiller et Diana Rigg. Il a été adapté par Lawrence B. Marcus et John Gay d'après le scénario original et réalisé par Alan Gibson.
Citations
Janet Mackensie : Perhaps you can help me, your Lordship. Six months, I have applied for my hearing aid and I am still waiting for it. Juge : My dear madame. Considering the rubbish that is being talked nowadays, you are missing very little.
Sir Wilfrid : Be prepared for hysterics and even a fainting spell. Better have smelling salts handy and a nip of brandy.
Christine Vole : I do not think that will be necessary. I never faint because I am not sure that I will fall gracefully and I never use smelling salts because they puff up the eyes. I am Christine Vole.
Leonard Vole : But this is England, where I thought you never arrest, let alone convict, people for crimes they have not committed.
Sir Wilfrid : We try not to make a habit of it.
Miss Plimsoll : Teeny weeny flight of steps, Sir Wilfrid, we mustn't forget we've had a teeny weeny heart attack.
Leonard Vole : What are you looking for?
Christine Vole : My accordion.
Leonard Vole : I think I've found it.
Christine Vole : Step on it again. It's still breathing.
Leonard Vole : It's horrible! In a gemutlich sort of way.
Mr. Myers : I hope we are not to be deprived of the learned and stimulating company of Sir Wilfrid?
Sir Wilfrid : I am constantly surprised that women's hats do not provoke more murders.
Miss Plimsoll : Shall we roll up the window, Sir Wilfrid?
Sir Wilfrid : Just roll up your mouth, you talk too much. If I'd known how much you talk I'd never have come out of my coma. This thing weighs a ton.
Christine Vole : Damn you. Damn you. Damn you! Damn you!
Miss Plimsoll : Wilfrid the Fox! That's what they call him, and that's what he is!
Sir Wilfrid : [devenant progressivement plus agité] The question is whether you were lying then or are you lying now... or whether in fact you are an habitual and compulsive LIAR!
Sir Wilfrid : If you were a woman, Miss Plimsoll, I would strike you!
Critique
Adapté d'un roman de la célèbre Agatha Christie, Witness for the prosecution, film de 1957, est à mi-chemin entre un polar, un film juridique et par certains aspects, une comédie et une romance. Il met en scène un avocat renfrogné mais compétent et consciencieux qui se bat pour que la justice triomphe. Il a ses convictions et ne se laisse dominer que par lui-même...
Ce film de procès fait la part belle à la dénonciation de la culpabilité, de la désinvolture, de l'amour caché, du mensonge ; il est porteur d'une grande moralité même si celle-ci ne s'exprime que par le manque de moralité justement de plusieurs des personnages présents...
L'histoire menant au procès est classique : une femme riche et seule aurait été tuée par celui qu'elle avait désigné comme son héritier mais c'est sur les personnages complexes et à plusieurs facettes que l'intérêt du film repose. Le scénario est en tout cas fin et compréhensible avec des flash backs parfaitement orchestrés pour exposer la "relation" Vole / French et la rencontre de Vole avec son épouse en Allemagne quelques années plutôt. Le scénario possède une construction solide et est rythmé par de riches rebondissements, ce jusqu'à la toute dernière minute du film. En résumé, l'ensemble est vraisemblable et progresse sans incohérences, ni longueurs pour capter l'attention d'un spectateur tenu en haleine grâce à l'émergence régulière de nouveaux imprévus tels que les lettres de Christine à ce soit-disant Max, le refus de celle-ci de témoigner pour et non contre son mari...
La réalisation de Billy Wilder est agréable et recherchée avec, par exemple, le "jeu" du monocle de l'avocat, les gros plans sur les comprimés alignés de celui-ci ou les plans en contre-plongée lorsque Vole est accâblé durant son procès...
Pour servir la comédie, Billy Wilder a ajouté le personnage de Miss Plimsoll, l'infirmière, qui n'existait dans le roman originel. Ce personnage est joué par la propre femme de Charles Laughton, Elsa Lanchester. Le couple à la ville, et on pourrait même dire à l'écran de par les liens qui les unit, à savoir infirmière à patient, fait ici des étincelles, désopilant à souhait : plus il est bougon, plus elle le materne et inversement. Il veut lui échapper, refuse de se plier à ses recommandations mais en vérité, ils ne peuvent se départir l'un de l'autre pendant tout le temps du film. En outre, le rôle de Miss Plimsoll se destine à guider les réactions du public durant le procès. Un procès qui tourne autour, bien entendu, des trois personnages principaux : Sir Wilfried Robarts, l'accusé et son épouse. L'avocat, rusé, fait preuve d'une grande habilité basée pourtant sur une apparente légèreté pour servir M. Vole. Le jeu de Charles Laughton se focalise sur nombre de prouesses verbales et visuelles. L'acteur se révèle, comme à son habitude, époustouflant de justesse et de drôlerie, énergique et virulent malgré l'état de santé de son personnage. Le duel qui l'oppose à Marlene Dietrich est intense. Celle-ci possède une présence magnétique, un regard acéré, un visage inébranlable, une tenue impeccable pour planter une Christine Vole froide et inaccessible. Rien ne semble l'atteindre si ce n'est qu'à la toute fin de Witness for the Prosecution. Enfin, dernier élément du trio : Tyrone Power, dont c'est le dernier rôle, emporté l'année suivante par une crise cardiaque. Quand on regarde rétrospectivement le film dans son ensemble, on se rend encore mieux compte du talent de Tyrone Power pour incarner le personnage de Vole, l'innocente victime en proie au désarroi mais... sans foi ni loi.
Les mots les plus forts sont logiquement les deux coups de théâtre finaux mais également les différents témoignages au cours du procès, notamment celui de Vole... La première apparition de Christine au cabinet de Sir Robarts marque également l'esprit du spectateur.
En conclusion, Witness for the Prosecution est un mélange de genres passionnant, aux aspirations comiques bien choisies, servi par des personnages, joués par d'excellents acteurs, tous très ambigus qui donnent du relief à une histoire déjà pleine de caractère. C'est un film surprenant où Billy Wilder, touche à tout génial, y manœuvre les spectateurs avec une aisance magistrale. On se laisse doucement bercer par l'intrigue avant de savoir que nous n'avons été que des pions dans une partie d'échecs où le réalisateur s'est révélé être le virtueux joueur... et vainqueur !
Quelques photos
Pour en savoir plus sur Tyrone Power, vous pouvez consulter sur ce même site : Tyrone Power