joi, 14 septembrie 2023

GREGORY PECK (1916-2003)

 
LES ACTRICES ET ACTEURS

GREGORY PECK

Acteur volontaire, Gregory Peck a imposé sa forte personnalité. Dans les années 1940 et 1950 il a tourné plusieurs films de premier plan.  Sa carrière se signala ensuite par un engagement politique très marqué.  

Né le 5 avril 1916 à La Jolla, en Californie, fils d’un pharmacien d’origine irlandaise, Gregory Peck serait peut-être devenu docteur en médecine si le démon des planches ne l’avait saisi à l’université de Berkeley. Mais c’est au cinéma qu’il allait faire sa carrière, malgré la rebuffade qu’il essuya de la part de David O. Selznick, en 1941, à la suite d’un bout d’essai qui fit dire au célèbre producteur que la future vedette n’avait aucune personnalité et ressemblait trop à Abraham Lincoln pour s’imposer…  

Ses succès sur les scènes de Broadway lui permirent toutefois de décrocher bientôt un premier rôle à l’écran, dans Days of Glory (Jours de gloire, 1944), de Jacques Tourneur. Si le film ne devait pas recueillir un grand succès, l’acteur, en revanche, fut aussitôt remarqué : le visage hâve et énergique de Gregory Peck faisait merveille dans le rôle d’un chef de partisans soviétiques !  

Gregory Peck, judicieusement conseillé par un agent avisé, Leland Hayward, eut alors l’intelligence de ne pas lier sa carrière à celle d’un seul studio, ce qui lui permit d’incarner des personnages extrêmement variés et de jouer sous la direction des meilleurs cinéastes. Peu d’acteurs peuvent en effet se vanter d’avoir contribué à la réussite d’autant de bons films en aussi peu de temps, comme le démontre une simple énumération : The Valley of Decision (La Vallée du jugement, 1945) de Tay Garnett , Spellbound (La Maison du Dr Edwards, 1945) d’Alfred HitchcockDuel in the Sun (Duel au soleil, 1946) de King Vidor, The Case Paradine (Le Procès Paradine, 1947) de HitchcockYellow Sky (La Ville abandonnée, 1948) de William Wellman, sans oublier le truculent The World ln His Arms (Le Monde lui appartient, 1952) de Raoul Walsh. Dans ce dernier film, Gregory Peck compose un sympathique et rude loup de mer, et sa finesse athlétique fait merveille sous la férule endiablée de Raoul Walsh. 

LES FILMS DE HENRY KING  

Mais ses rôles les plus originaux et les plus profonds, Gregory Peck les devra à Henry King, cinéaste éclectique dont le style éminemment classique n’a pas toujours été estimé à sa juste valeur. Si l’on peut oublier le médiocre David and Bethsheba (David et Bethsabée, 1951), force est de reconnaître que l’acteur est admirable dans Twelve O’Clock High (Un Homme de fer, 1949), où il incarne un officier supérieur obligé d’envoyer ses hommes à la mort, et surtout dans The Gunfighter (La Cible humaine, 1950), qui est un chef-d’œuvre. Dans ce western d’une rare singularité, Henry King a su utiliser avec intelligence la personnalité de Gregory Peck : la densité ombrageuse de ses expressions confère un caractère véritablement tragique à son personnage de tireur d’élite traqué par un destin impitoyable. Huit ans plus tard, en 1958, c’est encore Henry King qui lui permettra, dans The Bravados (Bravados), de renouveler ce type de performance.  

DÉTOURS VERS LA COMÉDIE 

La première véritable incursion de Gregory Peck dans la comédie fut Roman Holiday (Vacances Romaines, 1953), réalisé par William Wyler. Il a dépeint le journaliste américain Joe Bradley face à Audrey Hepburn interprétant une princesse européenne dans son premier rôle cinématographique important. Le rôle de Gregory Peck  avait été initialement proposé à Cary Grant, qui l’a refusé parce que le rôle semblait être davantage un rôle de « soutien » pour la princesse. Peck avait la même inquiétude, mais il fut persuadé par Wyler que le tournage sur place à Rome serait une expérience exceptionnelle et accepta le rôle, insistant même finalement pour que le nom de Hepburn soit au-dessus du titre du film (juste en dessous du sien) dans le générique d’ouverture. Peck a déclaré plus tard qu’il avait dit à son agent : « Je suis assez intelligent pour savoir que cette fille va gagner l’Oscar dans son premier film, et je vais ressembler à un foutu imbécile si son nom n’est pas là-haut au-dessus du mien. 

Pour la comédie romantique Designing Woman (La Femme modèle, 1957) de Vincente Minnelli, Gregory Peck fut autorisé à choisir l’actrice principale : Lauren Bacall , qui se contentait d’être occupée par son travail car son mari (Humphrey Bogart) était alors gravement malade. Le film tourne autour d’un créateur de mode et d’un écrivain sportif en vacances en Californie qui ont une romance éclair et un mariage précipité alors que le personnage de Peck a déjà une petite amie à la maison. Ils découvrent à leur retour à New York qu’ils ont des modes de vie très différents. Il retournera dans la comédie en 1966 dans Arabesque de Stanley Donen. Le réalisateur, après le triomphe de Charadedécide de réitérer dans un même genre en remplaçant le couple Audrey Hepburn-Cary Grant par le couple Sophia Loren-Gregory Peck, le résultat sera moins bien réussi.  

UNE CERTAINE IDÉE DU CINÉMA  

Gregory Peck se faisait une très haute idée de son métier et, conscient de ses possibilités, voulait participer de très près à l’élaboration et à la réalisation de ses films. Très vite, il s’associe à la production, remplit ses scénarios d’annotations et cherche à cerner au plus près les personnages qu’il affectionne, au risque de s’exposer à de sévères critiques : ce fut le cas avec son interprétation de Francis Scott Fitzgerald dans Beloved Infidel (Un Matin comme les autres, 1959), film qui ne compte d’ailleurs pas parmi les meilleurs de Henry King.  

Ses rapports avec William Wyler, pendant le tournage des The Big Country (Les Grands Espaces, 1958), ne furent pas des plus idylliques. Wyler n’était pas homme à accepter la moindre observation, et Gregory Peck, qui coproduisait le film, prétendait avoir son mot à dire, se mettant à contester l’opportunité de tel ou tel plan. William Wyler, excédé, finit par lui faire une réponse digne du général Cambronne, après quoi les deux hommes ne s’adressèrent plus la parole pendant plusieurs années ! 

La vérité est que Gregory Peck, qui était un idéaliste, avait quelque peu tendance à se croire investi d’une mission. Convaincu de l’influence morale bénéfique que le cinématographe pouvait exercer sur les foules, il s’était délibérément orienté vers des compositions non exemptes, malheureusement, de grandiloquence. Celles-ci lui valurent cependant ses plus grands succès, notamment avec Moby Dick (1956) de John HustonOn the Beach (Le Dernier Rivage, 1960) de Stanley Kramer, The Guns of Navarone (Les Canons de Navarone, 1961) de Jack Lee Thompson et To Kill a Mockingbird (Du silence et des ombres, 1962) de Robert Mulligan. Gregory Peck reçut un Oscar pour ce film dans lequel il était un petit avocat de province chargé de défendre un Noir.  

UN ACTEUR PROGRESSISTE  

Les convictions démocratiques de Gregory Peck n’étaient pas de pure forme. Il s’est en effet réellement engagé, participant aux travaux de plusieurs associations corporatives et luttant avec force pour les droits civiques. C’est lui qui, en 1958, réussit à faire reporter la cérémonie de remise des Oscars, en guise de protestation contre l’assassinat de Martin Luther King. Mais son acte le plus courageux, Gregory Peck l’accomplit sans doute en produisant, en 1972, The Trial of the Catonsville Nine, vibrant plaidoyer en faveur des objecteurs de conscience et critique radicale de l’intervention américaine en Indochine. Ses idées très nettement progressistes sont curieusement restées associées, chez lui, à un indéniable penchant à la mégalomanie. Celui-ci est manifeste dans quelques-uns de ses tout derniers rôles : ce n’est pas sans complaisance qu’il campe le bouillant et quasi dictatorial général américain dans MacArthur (MacArthur, le général rebelle, 1977), du très terne Joseph Sargent…  [La grande histoire illustrée du 7ème art – Editions Atlas (1983)]


En préparant Spellbound, Hitchcock était certain de deux choses : il voulait réaliser le premier film sur la psychanalyse, et il voulait travailler avec Ingrid Bergman. Du premier impératif naquit une œuvre mêlant avec brio conflit psychologique et intrigue policière, grâce notamment à la collaboration du peintre Salvador Dali. Du second jaillit une magnifique histoire d’amour galvanisée par l’attention toute particulière que le réalisateur portait à son actrice. I

Les créations d’Hitchcock ont toujours été étroitement liées aux producteurs qui l’ont fait travailler, parfois même très étroitement. C’est particulièrement vrai pour The Paradine case, qu’Hitchcock réalisa pour David O. Selznick. Bien que surveillé de très près par son producteur, qui garda la main mise sur le film du début à la fin de la production, le réalisateur parvint néanmoins à signer une œuvre qui, indéniablement, porte sa marque. 

Il est journaliste sportif, habite dans « une boîte à chaussures » désordonnée, aime le poker et les copains, se nourrit de sandwiches et de bière. Elle est modéliste, habite dans un appartement spacieux et moderne, fréquente le tout New York et ses amis sont raffinés. Voici une fois de plus deux mondes apparemment inconciliables face à face.  Et lorsqu’ils doivent cohabiter (partie de poker d’un côté, répétition du show musical de l’autre), l’harmonie n’est guère possible.